La Russie, un des premiers producteurs mondiaux de brut, a imposé jeudi aux entreprises pétrolières de ne pas exporter d'essence en mai pour remédier à une pénurie de carburant qui touche depuis plusieurs jours de nombreuses régions du pays.

«En mai, les compagnies ne vont pas exporter, tous les volumes seront livrés sur le marché intérieur», a déclaré le vice-ministre de l'Énergie, Sergueï Koudriachov, cité par les agences russes.

Dans un communiqué publié un peu plus tard, le ministère de l'Énergie a précisé que les entreprises concernées étaient Rosneft et Gazprom Neft, des groupes contrôlés par l'État.

Cette décision a été prise alors que depuis ce week-end, de nombreuses stations-service du pays se sont retrouvées à court de carburant.

La situation est particulièrement critique dans la région de l'Altaï, au sud de la Sibérie, qui a vu depuis samedi des files de voitures s'allonger devant les stations.

La plupart des pompes indépendantes ont dû y arrêter leur activité dès le week-end et dans les autres, seuls les conducteurs possédant une carte de client permanent pouvaient être approvisionnés, et à raison de 20 litres par véhicule.

Mais d'autres régions sont aussi concernées. Dans la région de Voronej (600 km au sud de Moscou), les réserves d'essence sans-plomb 95 et 98 risquent de s'épuiser ce jeudi et les prochaines livraisons sont prévues pour le 1er mai seulement, a indiqué jeudi l'administration locale, citée par l'agence Itar-Tass.

Dans son communiqué, le ministère de l'Énergie russe a toutefois indiqué que la situation «était sous contrôle» et que dans l'Altaï, les limitations sur les approvisionnements des conducteurs en essence dans les stations étaient levées.

Lors d'une réunion avec le Premier ministre russe Vladimir Poutine, jeudi après-midi, M. Koudriachov a indiqué que le déficit était dû à une hausse des ventes d'essence à l'étranger.

Le pays a exporté trois millions de tonnes de produits pétroliers sur les quatre premiers mois de 2011, soit autant que tout ce qu'il a exporté en 2010, a-t-il indiqué, cité par Ria Novosti.

Selon les analystes, les compagnies ont préféré réorienter leurs ventes à l'export, après que les autorités russes ont imposé en février de maintenir le prix à la pompe artificiellement bas afin de lutter contre l'inflation, l'une de leurs bêtes noires, dont l'accélération est particulièrement inopportune à l'approche de l'élection présidentielle de 2012.

Pour inciter les entreprises à vendre sur le marché intérieur, M. Poutine a demandé au ministère de l'Energie d'augmenter les taxes à l'exportation sur les produits pétroliers, tout en appelant à une baisse des taxes locales sur l'essence.

«Préparez des propositions et des documents pour augmenter les taxes à l'exportation des produits pétroliers», a-t-il dit, cité par les agences russes.

«Je demande aux ministères de l'Énergie et des Finances de se pencher sur le problème d'une révision des charges sur le secteur pétrolier - il peut y avoir ici un ajustement avec une baisse de la TVA ou des accises», a-t-il ajouté.

Tandis que les autorités ont fort à faire pour ne pas mécontenter la population, M. Koudriachov a admis que les prix de l'essence allaient sans doute augmenter dans le pays, dans un contexte de prix élevé du baril de brut, tout en assurant que cela ne dépasserait pas 5%.