La révolte en Libye est surveillée avec attention et inquiétude par les autres membres de l'OPEP, qui se disent prêts à augmenter leur production en cas de pénurie de pétrole, mais excluent toute intervention immédiate, jugeant que le marché demeure largement approvisionné.

Les violences en Libye, qui commencent à affecter la production d'hydrocarbures du pays et ont fait bondir les cours du brut à 108 $ à Londres, mobilisent l'attention des ministres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), dont certains étaient réunis mardi à Ryad.

«Nous sommes particulièrement préoccupés par la Libye, car c'est un membre de l'OPEP et un important producteur de brut», a souligné Mohammad Ben Zaën al-Hameli, ministre de l'Énergie des Emirats arabes unis, en marge d'une réunion du Forum international de l'énergie (IEF).

«N'importe quelle mauvaise nouvelle dans la région affecte les prix du pétrole, et les poussent vers le haut», confirmait son homologue du Koweït, cheikh Ahmad Abdallah al-Sabah, mais selon lui «il ne s'agit pas d'une histoire de déséquilibre entre l'offre et la demande».

En effet, «le marché est bien approvisionné, et il y a peut-être même une surabondance de l'offre» de pétrole, a-t-il asséné, désignant deux facteurs à la récente envolée des prix: «la spéculation et la situation politique» au Moyen-Orient, où la vague de contestation contre les régimes en place ne cesse de s'étendre.

L'Arabie saoudite, de loin le plus gros producteur de l'OPEP et gendarme du cartel, a de son côté affirmé être prête «à réagir immédiatement» pour pallier toute carence qui surviendrait du fait des mouvements de révolte en Libye.

Mais pour le ministre saoudien du Pétrole, Ali ben Ibrahim al-Nouaïmi, nous n'en sommes pas encore là: «il y a des inquiétudes et de la peur sur le marché, mais pas de pénurie pour le moment», a-t-il estimé.

«L'Arabie saoudite a toujours répondu dans le passé aux situations de pénuries, et nous le referons; je le répète haut et fort pour que tout le monde dorme cette nuit sur ses deux oreilles», a insisté M. Nouaïmi.

Il a ainsi mis en avant les importantes capacités de production du pays, susceptible de fournir plus de 4 millions de barils par jour supplémentaires, indiquant que la situation actuelle était «très différente» de celle de 2008, année où les prix du baril s'étaient envolés jusqu'à près de 140 $.

«La volatilité que nous voyons résulte de troubles temporaires, elle s'estompera à court terme», a expliqué le ministre saoudien, qui a réitéré la fourchette de prix qu'il juge satisfaisants, entre 70 et 80 $ le baril.

De leur côté, les pays consommateurs, eux aussi présents à Ryad, témoignaient de leur inquiétude face la crise libyenne, mais confirmaient que les approvisionnements de brut n'étaient pas encore sous pression.

«Nous suivons avec une grande attention ce qui se passe en Libye (...) mais nous n'avons pour notre part pas de pénurie à déplorer pour le moment», a confié aux journalistes le ministre anglais de l'Energie, Charles Hendry.

L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a quant à elle rappelé que les stocks des pays consommateurs restaient «très importants».

En revanche, pour les États-Unis, la tendance générale du redémarrage économique mondial et la hausse des prix devraient se conjuguer pour forcer l'OPEP à ouvrir ses robinets.

«Au cours des derniers mois, une consommation croissante a soutenu les cours, et on s'attend à ce que tous les pays producteurs augmentent leur offre pour répondre à cette tendance», a indiqué Daniel Poneman, secrétaire d'Etat américain adjoint à l'Energie.

«Nous en discuterons, pas maintenant, mais lors de notre prochaine réunion», a affirmé le ministre du Koweït, interrogé sur un possible relèvement des quotas de production du cartel. La prochaine réunion de l'OPEP est programmée en juin à Vienne.