L'industrie affirme qu'il est trop tard pour revenir sur les conditions très avantageuses des permis d'exploration déjà délivrés à des sociétés prospectant le gaz de schiste au Québec, même si cette activité rapporte des centaines de millions en Colombie-Britannique.

«Il est évident qu'on va défendre les intérêts des actionnaires, qui ont pris les risques de financer nos travaux d'exploration», a dit le président de l'Association pétrolière et gazière du Québec André Caillé, hier, en entrevue à La Presse. M. Caillé est aussi administrateur de la société Junex.

Samedi, La Presse a révélé que la mise aux enchères des permis d'exploration pétrolière et gazière rapportait chaque année 750 millions de dollars en Colombie-Britannique, en grande majorité (plus de 90%) dans le secteur du gaz de schiste, alors qu'au Québec, ces mêmes permis ont rapporté moins de 4 millions en deux ans.

Cette différence s'explique, selon M. Caillé, par le fait que personne ne croyait à l'existence de cette ressource au Québec, sauf quelques entreprises comme Junex.

En 1984, un rapport de la Soquip (Société québécoise d'exploitation pétrolière) avait même conclu à l'absence de ressource gazière au Québec.

Il affirme que le tournant est survenu le 1er avril 2008, quand la société américaine Forest Oil, de Denver, a foré un puits pour le compte de Junex et a «mis au monde» le gisement du shale d'Utica, au Québec. «Personne ne croyait avant 2008 qu'on trouverait du gaz au Québec», a dit M. Caillé.

Il refuse aussi toute notion de moratoire. «L'annonce d'un moratoire, c'est pas ça qui va faire monter les actions, dit-il. On a un moratoire sur les forages dans le Golfe qui devait durer un ou deux ans et il est encore là après 10 ans.» En même temps, il souligne qu'il n'y a actuellement aucun forage au Québec.

Il dit que l'industrie détient des études comparatives sur les coûts imposés ailleurs sur l'exploration et l'exploitation du gaz, mais qu'il ne veut pas les partager. «C'est au gouvernement de faire son travail, dit-il. Nous, ce qu'on dit, c'est que ça prend des conditions pour que ça se développe de façon concurrentielle.»

S'il rejette le modèle de la Colombie-Britannique pour la mise aux enchères des permis d'exploration, ce n'est pas le cas pour le système de surveillance et d'inspection gouvernemental, financé à même les permis de forages et autres.

Au Québec, un permis de forage coûte 100$, alors qu'en Colombie-Britannique, c'est 10 000$, un chiffre qui n'a pas fait broncher M. Caillé. «Il va falloir que le gouvernement fasse son travail, dit-il. La surveillance, on est tous d'accord. C'est dans le meilleur intérêt des citoyens et aussi des entreprises.»

M. Caillé a aussi défendu l'embauche de Stéphane Gosselin, qui est passé en trois jours du poste de chef de cabinet du ministre du Développement économique, Clément Gignac, à celui de directeur général de l'Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ). M. Gosselin avait auparavant été chef de cabinet aux Ressources naturelles et à l'Environnement.

«On a choisi Stéphane Gosselin pour sa connaissance du milieu municipal et environnemental québécois, a dit M. Caillé. Sur ces critères, il était le meilleur. On avait 15 candidats et un comité de sélection. Comment je fais pour dire à la fin de tout ce processus: 'Le meilleur c'est lui, mais je le prends pas'? Comme industrie, on s'est informé si les lois étaient respectées, et c'est le cas.»

Quant aux accusations de «copinage» lancées au sujet de l'industrie et le Parti libéral, il répond par une boutade: «Ces jours-ci, ce serait plutôt le contraire, on va peut-être avoir de la misère à avoir des copains.»