Le processus de nomination des régisseurs de la Régie de l'énergie laisse à désirer et ne garantit pas l'indépendance de l'organisme devant le pouvoir politique, estime un autre groupe d'affaires du Québec.

À son tour, l'Association des consommateurs industriels d'électricité met en doute l'indépendance de la Régie de l'énergie. L'association, qui regroupe les alumineries et les autres grandes entreprises du Québec, est du même avis que la division québécoise de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui a remis en cause devant les tribunaux l'absence de processus de sélection des régisseurs et les mandats trop courts qui leur sont confiés.

Ce n'est pas acceptable, selon Luc Boulanger, porte-parole de 150 des plus grandes entreprises installées au Québec. «Compte tenu de l'importance des enjeux et de la complexité des dossiers qui sont confiés à la Régie, il faut revoir le processus», a-t-il expliqué.

Actuellement, n'importe qui peut être nommé à la Régie. Il n'y a aucune qualification requise et les mandats sont de deux à cinq ans, sans renouvellement prévu, ce qui place les régisseurs dans une situation précaire face au gouvernement qui peut les remplacer à son gré.

L'Association des consommateurs industriels d'électricité a comparé les processus de sélection des membres d'autres tribunaux administratifs, comme la Commission des relations de travail et le Tribunal administratif du Québec. Par exemple, pour siéger à la Commission des relations de travail, un commissaire doit avoir une connaissance de la législation et 10 années d'expérience. Son mandat est renouvelable, à moins qu'il y ait des motifs de renvoi ou de réprimande, qui sont aussi prévus dans le processus.

Il n'y a rien de tel à la Régie de l'énergie, ni d'ailleurs à la Régie des marchés agricoles, a constaté Luc Boulanger. Les régisseurs de ces deux entités sont nommés par le gouvernement, sans conditions d'admissibilité ni consultation préalable auprès des intéressés.

L'Association des consommateurs industriels d'électricité, qui représente la grande entreprise, et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui représente les PME, sont d'importants intervenants devant la Régie de l'énergie, principalement dans les causes qui concernent les tarifs d'électricité.

Les deux s'interrogent sur l'impartialité de la Régie dans les dossiers qui concernent Hydro-Québec, dont l'actionnaire est le gouvernement du Québec. Depuis sa création, en 1997, la Régie n'a pas souvent rendu des décisions contraires aux intérêts d'Hydro-Québec.

La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante conteste devant les tribunaux quelques-unes des décisions de la Régie concernant les tarifs d'électricité. Dans les documents déposés en cour, la Fédération plaide que «la Régie de l'énergie est un tribunal administratif qui joue un rôle important dans la société québécoise et que les exigences de garantie et d'indépendance devraient être modulées à la hausse». De même, «une personne bien renseignée éprouverait des craintes raisonnables de partialité à l'égard de la Régie de l'énergie», soutient la FCEI.

Les représentants des groupes de consommateurs, qui interviennent régulièrement devant la Régie, se posent aussi des questions, mais ni l'Union des consommateurs ni Option Consommateurs n'ont voulu prendre position publiquement sur cette question.

Contrairement aux associations d'entreprises, qui ont les moyens financiers de défendre leurs intérêts devant la Régie, les groupes de consommateurs sont moins riches et donc plus dépendants de leur statut d'intervenant accordé par la Régie, qui leur permet de réclamer le remboursement de ce que coûtent leurs interventions.