Le secteur québécois de la foresterie a perdu 440 travailleurs de plus, mercredi, alors que le producteur de papier et de bois d'oeuvre Kruger a fait part de son intention de réduire la production dans ses installations de Trois-Rivières.

«Compte tenu des conditions de marché qui demeurent très défavorables, en particulier la valeur élevée du dollar canadien, et la faiblesse de la demande -qui a baissé de plus de 30% dans les deux dernières années- nous avons dû prendre la décision d'interrompre la production de certains types de papier à nos deux usines de Trois-Rivières», a expliqué le vice-président aux affaires corporatives et aux communications de Kruger, Jean Majeau.

La société privée a indiqué qu'elle interrompait pour une période indéterminée la production de papier couché et de papier surcalandré à l'usine Kruger de Trois-Rivières. Cette mesure affectera environ 320 employés répartis dans les secteurs de la production, de l'entretien et de l'administration, a précisé l'entreprise.

Néanmoins, l'usine poursuivra la production de papier journal, ce qui représente le maintien de quelque 300 emplois.

Kruger a également indiqué prolonger pour une période indéterminée l'interruption, annoncée le 31 décembre, de la production de papier annuaire à l'usine Wayagamack, également à Trois-Rivières. La production à cette usine devait redémarrer en juin. Le prolongement de l'arrêt affecte environ 120 employés.

L'usine Wayagamack poursuivra la production de papier couché, ce qui représente le maintien de plus de 350 emplois.

«La valeur très élevée du dollar canadien nuit beaucoup aux exportateurs», a fait valoir M. Majeau. «Nous exportons aux États-Unis plus de 80% de notre production. Plus le dollar canadien est élevé, moins nos revenus sont élevés.»

Ces mesures surviennent quelques jours à peine après que la société AbitibiBowater eut annoncé la fermeture pour une période indéterminée de son usine de pâtes et papiers de Gatineau, en Outaouais, provoquant la mise à pied de 330 employés.

Puisque AbitibiBowater, insolvable, jouit de la protection de la Loi des arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC), ses travailleurs ne pourront profiter d'indemnités de cessation d'emploi.

Le syndicat représentant les travailleurs forestiers a déploré l'annonce faite mercredi par Kruger.

«Une fois de plus, nos membres paient très chers le coût de cette crise, alors qu'ils ont largement donné, ces derniers mois, en concessions de toutes sortes», a affirmé le vice-président du Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (SCEP), Renaud Gagné.

Les pertes d'emplois croissantes dans le secteur de la foresterie exigent une intervention du gouvernement fédéral, qui préfère «défendre les banques et les pétrolières», a ajouté M. Gagné.

L'industrie forestière canadienne a mis à pied des dizaines de milliers de travailleurs ces dernières années, alors que la demande de papier a chuté et que la baisse de mises en chantier aux États-Unis s'est traduite par une diminution de la demande de bois d'oeuvre. En outre, la valeur élevée du dollar canadien a durement affecté la capacité concurrentielle des usines du pays.

Fondée en 1904, la société Kruger est un important producteur de papiers pour publications; de papiers à usages domestiques et institutionnels; de bois d'oeuvre et autres produits du bois; de boîtes de carton à base de fibres recyclées; d'énergie verte et renouvelable; mais également de vins et spiritueux. L'entreprise possède des établissements au Québec, en Ontario, en Colombie-Britannique, à Terre-Neuve-et-Labrador et aux États-Unis.