Maintenant que l'hiver tire à sa fin, le prix du gaz naturel retourne vers les bas-fonds, où il a passé une bonne partie de l'année 2009. Hier, le prix du gaz pour livraisons en avril a chuté de 5,1%, sa plus forte baisse depuis cinq mois.

Ni les températures hivernales ni le début de reprise économique aux États-Unis n'ont fait augmenter sensiblement le prix du gaz naturel, comme c'est le cas d'habitude. Il ne faudrait pas en conclure que les règles économiques de base ne fonctionnent plus. Au contraire.

C'est tout simplement la loi de l'offre et de la demande qui maintient les prix à leur bas niveau actuel. L'offre est en forte hausse, alors qu'il n'y a pas si longtemps, on craignait la pénurie.

C'est la découverte des gaz de schiste qui a fait la différence. «C'est le joker que personne ne s'attendait à voir apparaître et qui change radicalement la donne», a illustré cette semaine la présidente et chef de la direction de Gaz Métro, Sophie Brochu.

Le gaz de schiste est en effet responsable de grands bouleversements dans le secteur du gaz. Il est responsable d'une première augmentation de la production américaine de gaz depuis 10 ans et d'une augmentation sans précédent des réserves, après des années de diminution.

Cet accès nouveau à des réserves considérables de gaz, que les nouvelles technologies de forage ont rendu accessible, a des impacts positifs et négatifs. Du côté négatif, les investisseurs qui ont parié que les prix du gaz se remettraient à flamber avec la reprise de l'économie devront ronger leur frein.

De même, Gaz Métro est forcée de retarder et peut-être même d'oublier pour de bon son projet de terminal méthanier pour lequel elle a dépensé beaucoup de temps et d'argent.

La baisse du prix du gaz et la probabilité que les prix restent bas pendant encore longtemps ont aussi un impact négatif sur Hydro-Québec, qui veut profiter à fond des occasions d'exportation sur le marché américain. Le gaz naturel est très utilisé pour produire de l'électricité dans le nord-est des États-Unis, le principal marché d'Hydro. La baisse des prix du gaz entraine une baisse du prix de l'électricité, qui rend les exportations québécoises moins payantes.

En plus de l'offre abondante, un autre facteur contribuera à garder les prix du gaz relativement bas. C'est que la demande est à la baisse, une tendance lourde qui n'a rien à voir avec les soubresauts de l'économie. En 20 ans, les ménages américains ont réduit leur consommation de gaz de 22%, selon le département de l'Énergie des États-Unis.

Des équipements de chauffage plus performants et des améliorations dans les techniques de construction et d'isolation sont les principales explications de cette baisse de la demande.