Profondément modifié, le contrat d'achat des actifs d'Énergie Nouveau-Brunswick garantit tout de même à Hydro-Québec l'accès aux marchés de la Nouvelle-Angleterre, a indiqué hier le premier ministre Jean Charest.

En annonçant hier la transaction de 3,2 milliards qui devrait être bouclée fin mars, M. Charest a souligné que le gouvernement du Nouveau-Brunswick avait mal jaugé l'attachement de sa population à Énergie Nouveau-Brunswick.

La nouvelle entente serait plus simple à gérer que celle d'octobre dernier. Hydro-Québec jouera le rôle de «grossiste», comme elle le fait pour d'autres clients. «Au lieu de 370 000 clients, on n'en aura qu'un: Énergie Nouveau-Brunswick», a-t-il souligné. Du même coup, Hydro-Québec se trouvera à l'abri des incertitudes liées à l'opinion publique locale face aux hausses de tarifs futures.

Craintes de la population

Le débat public au Nouveau-Brunswick a forcé des modifications au contrat. «Les deux gouvernements ont pris acte et révisé l'entente», a-t-il dit, sans toutefois battre sa coulpe.

Il appartenait selon lui au gouvernement du Nouveau-Brunswick de mesurer «l'attachement» de sa population à sa société d'État, et les gens ont probablement craint, comme consommateurs d'électricité, d'être à la merci d'une société extérieure sur laquelle ils n'auraient aucun pouvoir. Thierry Vandal, président d'Hydro, s'est rendu quatre fois au Nouveau-Brunswick pour expliquer les avantages du contrat de l'automne dernier.

Hydro a gardé le cap sur ses objectifs avec cette acquisition. Les centrales obtenues sont de qualité. Mais surtout, la transaction améliore la capacité du Québec d'exporter son énergie. «Il y a deux chiffres qui parlent. Hydro exporte 8% de sa production, mais cela représente 32% de ses profits», a souligné Jean Charest.

Au début de 2009, le gouvernement de Shawn Graham avait proposé à Hydro-Québec de lui vendre tous les actifs de sa société d'État pour 4,7 milliards. Le gouvernement Graham visait ainsi à réduire son imposante dette publique.

Après une forte controverse au Nouveau-Brunswick, et à l'approche des élections dans cette province, il a fallu revoir à la hâte l'entente de principe avec Québec. Le Nouveau-Brunswick conservera sa société d'État, qui restera responsable du transport de l'énergie et de la distribution auprès des consommateurs.

Pour M. Charest comme pour le président d'Hydro, Thierry Vandal, le Québec atteint tout de même son objectif principal avec le nouveau contrat. Il s'assure un accès à long terme aux lignes de transport du Nouveau-Brunswick, dont il aura 70% de la capacité, soit 670 mégawatts.

Hydro s'engage à fournir annuellement 14 térawatts aux consommateurs du Nouveau-Brunswick.

Ces contrats à long terme, assure M. Vandal, sont renouvelables au gré du Québec, lequel aura ainsi accès au marché du Nord-Est américain. Pour pouvoir faire transiter son énergie par le Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve devrait pouvoir compter sur de nouvelles lignes, a ajouté M. Vandal.

Les profits d'Hydro diminuent un peu avec le nouvel accord, on passe de 70 à 60 millions par année - on conserve un rendement de 10% sur l'avoir propre de l'acheteur, une bonne partie des 3,2 milliards requis pour cet achat est empruntée. Le tiers des employés d'Énergie Nouveau-Brunswick, environ 1000 personnes, changeront d'employeur.

Hydro-Québec deviendra propriétaire de sept centrales; celle, nucléaire, de Pointe Lepreau sera transférée à Hydro-Québec une fois les travaux de réfection complétés.

Pour M. Charest, cette entente n'est qu'une étape dans la volonté de Québec d'augmenter ses exportations. Un accord similaire est en discussion avec l'Île-du-Prince-Édouard et on voudrait faire de même avec la Nouvelle-Écosse. Dans ces deux cas, il faudrait traiter avec un propriétaire privé...