Le premier ministre Jean Charest a surpris son auditoire vendredi matin lors d'une conférence à Boston en annonçant officiellement le début de pourparlers entre le Québec et l'Ile-du-Prince-Édouard en vue d'un partenariat sur l'énergie.

Cette annonce survient tout juste deux semaines après que le Québec ait signé un protocole d'entente pour le rachat d'Énergie Nouveau-Brunswick pour la somme de 4,75 milliards de dollars.

«À compter d'aujourd'hui, mon collègue de l'Ile-du-Prince-Édouard, le premier ministre Robert Ghiz et moi-même, lançons les discussions pour développer un partenariat sur l'énergie», a-t-il dit aux quelque 150 gens d'affaires et fonctionnaires réunis pour la 17e Conférence annuelle sur l'énergie du New England-Canada Business Council (NECBC).

«L'Ile-du-Prince-Édouard, c'est un marché d'environ 100 mégawatts pour nous, mais c'est également un marché qui est en lien avec celui du Nouveau-Brunswick. C'est une négociation qui pourrait donner une occasion d'alimenter ce marché en énergie propre et renouvelable», a précisé le premier ministre lors d'un point de presse.

M. Charest croit que ces discussions pourraient aboutir à la création d'une zone carrefour stratégique pour l'énergie comprenant le Nouveau-Brunswick, l'Ile-du-Prince-Édouard et le Québec. «Les trois provinces ensemble vont développer ce concept de partenariat tripartite pour un carrefour stratégique», a-t-il expliqué.

Une entente pourrait également permettre d'envisager une ligne sous-marine qui alimenterait en électricité les Iles-de-la-Madeleine à partir de l'Ile-du-Prince-Édouard. «Les-Iles-de-la-Madeleine sont alimentées en énergies tirées du mazout qui produit des gaz à effet de serre», a rappelé M. Charest.

Interrogé sur la portée des pourparlers qui viennent de débuter, le premier ministre a précisé que «tout est sur la table».

N'écartant pas la possibilité de racheter le système de distribution d'électricité de l'Ile-du-Prince-Édouard qui appartient au privé, M. Charest a précisé que ce qu'il souhaite surtout, au départ, «c'est alimenter l'Ile-du-Prince-Édouard en énergie propre et renouvelable du Québec».

Le premier ministre, qui participait à la conférence annuelle du NECBC pour la première fois depuis 2004, a évidemment profité de l'occasion pour rassurer les gens d'affaires américains concernant le potentiel rachat d'Energie Nouveau-Brunswick par Hydro-Québec. «Les règles et les réglementations vont rester en place», a-t-il martelé.

Si ce projet de rachat suscite de vives discussions au Canada, les participants à la conférence de Boston semblaient accueillir cette nouvelle sans trop d'inquiétudes. «On peut se poser des questions, mais il s'agit d'un excellent projet particulièrement pour l'acheminement d'énergie», a dit James Robb, panéliste et vice-président au développement de Northeast Utilities, une compagnie de distribution de gaz et d'électricité.

L'homme d'affaires américain croit que cela va permettre une meilleure alimentation en électricité pour la Nouvelle-Angleterre, sans que les payeurs de taxes n'aient à débourser un sou.

Plus circonspect, Edwin G. Carr, directeur exécutif du Bureau de l'investissement et du commerce international de l'État du Massachusetts, dit suivre le dossier de près, mais préfère ne pas commenter. «Nous regardons, nous analysons les évolutions, mais nous voyons cela comme une question qui relève d'un autre État», confie-t-il.

Quelques producteurs d'électricité indépendants de Nouvelle-Angleterre ont toutefois exprimé des craintes dans les journaux face à l'expansion d'Hydro-Québec. Des craintes que Christian Brosseau, président de la branche américaine d'Hydro-Québec, a tenté d'apaiser en rappelant que toutes les règles et engagements en place vont demeurer.

«Cela va être la même chose après le 31 mars (2010)», a promis M. Brosseau en faisant référence à la date de clôture prévue pour la transaction entre Hydro et Énergie Nouveau-Brunswick.