La chute du prix de l'aluminium a été brutale l'automne dernier, mais la remontée se fait progressivement. Hier, le métal blanc s'échangeait même à un sommet de huit mois à Londres. Cette demande accrue ne se fait toutefois pas encore sentir dans les alumineries québécoises.

L'aluminium pour livraison dans trois mois a atteint le prix de 1890$US la tonne métrique sur le marché anglais hier et clôturé la séance à 1879$US, en hausse de 84$ US, soit près de 4,7%. Depuis son creux de la fin février, à 1288$US, l'aluminium se vend environ 45% plus cher.

On est encore loin des 3317$US la tonne atteints il y a un an, mais l'aluminium a quand même enregistré cette semaine sa plus longue séance de remontées depuis au moins 1987, selon des données publiées par Bloomberg.

Pourquoi? La raison est en partie chinoise. Depuis le début de l'année, les Chinois sont devenus des importateurs nets du métal blanc, souligne l'analyste Aleem Ladak, de Valeurs mobilières Desjardins, à Toronto.

«Ils produisent environ 3 millions de tonnes de moins, surtout à cause de Chinalco», ajoute M. Ladak. Selon d'autres rapports d'analystes, ces importations servent à refaire les réserves de l'empire du Milieu, les Chinois profitant ainsi des bas prix mondiaux.

La poussée d'hier a touché tous les métaux à Londres: cuivre, nickel et zinc gagnant tous entre 2% et 5%. Là aussi, l'explication est en partie chinoise.

Plus tôt cette semaine, les marchés ont craint que la Chine ne s'apprête à resserrer ses conditions de crédit, pour ralentir la croissance. Les autorités ont fait savoir hier qu'elles allaient continuer à appliquer une «politique monétaire accommodante».

Mais il y a plus que les Chinois. Les signes de reprise mondiale se multiplient, l'industrie automobile montre aussi des signaux encourageants et la demande pour les canettes augmente. Mais ces facteurs n'expliquent pas à eux seuls la hausse de la demande, selon Alex Heath, directeur général, métaux de base, chez RBC Marché des capitaux à Londres. «Le jeu des devises joue autant que l'économie actuellement», précise-t-il.

Un impact ici?

À l'Association de l'aluminium du Canada, on a aussi fait des calculs à partir d'un dollar américain déprécié. En en tenant compte, le prix actuel «tourne autour de 1300$US ou 1400$US, ce qui n'est pas vraiment plus que le prix d'il y a 10 ans», souligne son président, Jean Simard.

M. Simard ne saute donc pas au plafond quand on lui parle de la remontée des derniers mois. «C'est mieux, dit-il. Quand on tourne autour des 1300-1400$US, on tourne autour des coûts (de production). Ce ne sont pas de gros profits.»

«Nous, nos dépenses sont en dollars canadiens et australiens principalement», précise le porte-parole de Rio Tinto Alcan, Stefano Bertolli.

Rio Tinto Alcan a annoncé une réduction de sa production de 11% d'ici la fin de l'année. M. Bertolli précise que l'entreprise l'a, à ce jour, diminuée de 5% à 6%. Il reste donc la moitié du chemin à faire.

Inventaires en hausse

Si certains investisseurs regardent seulement le prix du métal blanc à Londres, M. Bertolli jette aussi un coup d'oeil sur les inventaires. Ils atteignent 4,5 millions de tonnes, soit un peu plus que la production annuelle totale de Rio Tinto Alcan.

«Avant de vraiment pouvoir dire qu'on est tirés d'affaire, il faut que l'inventaire soit revenu à des niveaux plus équilibrés», dit-il encore, soulignant qu'avant la chute des prix, l'inventaire tournait autour de 200 000 tonnes.

Depuis le début de l'année, la production mondiale d'aluminium a reculé d'environ 15%. Mais le Canada est moins touché.

Selon les données de l'Association de l'aluminium, les travailleurs canadiens et québécois ont produit 2,8% moins d'aluminium primaire cette année que l'an dernier. La baisse pourrait être de l'ordre de 3% pour l'ensemble de 2009, selon les prévisions de l'Association.