Devant la longue liste de tâches quotidiennes, les gestionnaires ne prennent pas toujours le temps de profiter des bienfaits du sourire. Pourtant, cette simple expression du visage constitue un outil de gestion puissant et peu utilisé, pensent les experts. Et si les employeurs cultivaient le sourire?

Martin Simard se décrit comme un patron dynamique, souriant et enjoué. Responsable de 80 employés, l'associé en solutions administratives à la firme Morneau Sheppell ne commence jamais ses journées et ses réunions sans saluer son personnel d'un large sourire. «C'est le point no 1 à mon agenda. Je pense que cette bonne humeur démontre ma passion pour mon travail. Je suis convaincu que le sourire et l'humour permettent de réaliser un plus grand nombre de choses», considère-t-il.

Souvent associé à une émotion de plaisir et de bien-être, le sourire joue plusieurs rôles. «On sourit par complicité, par politesse, pour séduire ou simplement pour créer un lien et entrer en communication avec l'autre. Le sourire est aussi présent dans le malaise et la timidité", énonce Christine Gagnon, synergologue. Dans le contexte du travail, le sourire donne de l'assurance et démontre une facilité d'approche, précise-t-elle.

Or, les dirigeants ne sourient pas assez, constate Farès Chmait, coach d'entreprise, motivateur et formateur. «Et lorsqu'ils sourient, les leaders ne le font pas nécessairement dans les bonnes circonstances. Pourtant, même en situation de crise, un sourire bien placé peut faire paraître plus en contrôle et bien dans sa peau.»

D'un naturel souriant, Martin Simard a pu constater les nombreux bienfaits de cette action. «Le sourire démontre de l'ouverture, de l'intérêt. Il m'a permis de créer un climat plus familial, sain, équilibré et d'établir un lien de confiance et de loyauté dans l'équipe», mentionne-t-il.

La culture du sourire

Les gestionnaires qui souhaitent profiter des vertus du sourire devraient-ils le mettre en pratique? Pas s'ils ne le ressentent pas, tranche Christine Gagnon. «Il faut avoir envie de sourire et éviter de forcer la note puisque ça va paraître. On peut toutefois se forcer à créer des liens interpersonnels qui vont induire des sourires», indique-t-elle.

L'employeur doit d'abord prendre conscience de l'impact du sourire sur le message à véhiculer, insiste M. Chmait. «Je répète à mes clients: «Arrêtons d'être intéressants et commençons à être intéressés! " On ne peut pas montrer de l'intérêt pour une situation ou pour une personne en fronçant les sourcils. Le sourire montre une forme de respect et de reconnaissance.»

Pour insuffler la bonne humeur au sein d'une organisation, Michel Tremblay, professeur au service de l'enseignement de la gestion des ressources humaines de HEC Montréal, suggère d'introduire le sourire dans les valeurs de l'entreprise: «La haute direction et les supérieurs doivent montrer l'exemple. Des entreprises comme WestJet ou la société française de télécommunications Orange ont inscrit le sourire et l'humour dans leur culture organisationnelle. Ce comportement est contagieux et constitue une forme d'attraction.»

Le sourire stratégique

Pour Martin Simard, peu de contextes sont défavorables au sourire. «Je m'adapte habituellement à mon interlocuteur, mais même en contexte de négociations sérieuses, rien n'empêche d'arriver à la rencontre en souriant.» Point de vue que partage Michel Tremblay: «Le sourire est l'antithèse de l'exclusion. Pour mobiliser le personnel, ça prend des émotions positives, et le sourire en fait partie. Les milieux de travail positifs rendent les employés plus performants, présents et loyaux. Ils réduisent les tensions et allègent l'atmosphère.»

Parfois, le sourire devient stratégique. «Si l'employeur doit gérer une crise, le sourire de complicité aide à créer un lien de confiance. En entrevue d'embauche, le sourire montre de l'empathie et peut servir de test pour voir comment le candidat réagit», suggère Mme Gagnon.