Le harcèlement psychologique est interdit par la Loi sur les normes du travail. Mais si cela se passait dans votre entreprise, sauriez-vous quoi faire?

Stéphanie a vécu l'enfer pendant un an et demi au boulot. Enceinte, elle devait former un collègue pour qu'il la remplace pendant son congé de maternité. Après que Stéphanie lui ait suggéré de prendre des notes pour éviter de reposer toujours les mêmes questions, la situation a tourné au vinaigre.

«Il m'a dit que je n'étais pas patiente et qu'il n'était pas certain que je ferais une bonne mère. Il m'a demandé si c'était dû à mes hormones de grossesse», raconte-t-elle.

Stéphanie a voulu cesser cette formation. Elle en a discuté avec ses patrons. La formation a cessé, mais le harcèlement s'est poursuivi.

«Je n'avais plus envie d'aller travailler. J'évitais toujours ce collègue. Il commençait à me faire peur. Un matin, je me suis mise à pleurer en sortant de la douche. Ce n'était vraiment pas moi! Finalement, mon congé de maternité est arrivé. Ça a été une belle fuite.»

Régler le problème

Aucun employeur ne souhaite se retrouver devant une telle situation.

«Pourtant, si c'est le cas, il doit agir», affirme Angelo Soares, professeur au département d'organisation et ressources humaines de l'École des sciences de la gestion (ESG) de l'UQAM.

D'abord, l'employeur doit déterminer s'il est face à du harcèlement (voir encadré), ou à un autre genre de problème.

Ensuite, il doit trouver une solution.

«Il doit opter pour une stratégie de médiation. Une tierce personne devrait essayer de trouver une solution en discutant avec chacun. Ensuite, elle doit mettre les deux personnes ensemble pour tenter de régler le problème», affirme M. Soares qui travaille sur la question du harcèlement depuis 15 ans.

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Lorsque Stéphanie est rentrée de son congé de maternité, le problème est revenu au galop.

«Le collègue m'a interpellée sur le fait que je l'évitais. Il a haussé le ton. Moi aussi. Le soir, j'ai fait une crise d'angoisse. Je me suis dit que ce n'était pas vrai que ça allait recommencer. J'en ai parlé à mes patrons et ils l'ont rencontré. Ils lui ont dit que ça suffisait. De mon côté, j'ai décidé de me tourner vers le programme d'aide aux employés», indique-t-elle.

Cette décision lui a permis de comprendre que ce n'était pas de sa faute.

«Le problème, c'est que je n'avais pas su mettre mes limites et j'avais tout pris sur moi. C'est difficile comme situation parce que la ligne est mince entre le conflit et le harcèlement. Maintenant, j'ai les outils pour m'en sortir si le harcèlement recommence avec lui, ou avec quelqu'un d'autre.»

Angelo Soares met toutefois un bémol aux programmes d'aide aux employés.

«C'est une bonne chose, mais ces programmes ont des limites. Souvent, ils comprennent cinq ou six séances avec un psychologue. Ce n'est pas suffisant. C'est très important de soigner correctement ces gens pour qu'ils soient capables de recommencer être productifs au travail.»

La prévention

Pour éviter qu'une situation du genre se reproduise, l'employeur doit aussi en chercher la cause.

«Il faut faire un diagnostic organisationnel, affirme M. Soares. Il se peut que ce soit dû par exemple à des injustices, à un manque de cohésion dans l'équipe, ou à une surcharge de travail.»

D'après le chercheur, tous sont gagnants lorsqu'une entreprise agit de façon préventive.

«Ainsi, les organisations et les individus sont plus performants. Être victime de harcèlement est une situation extrêmement dégradante et horrible pour la santé mentale. Les entreprises doivent être proactives.»

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Comment reconnaître le harcèlement psychologique au travail?

Le harcèlement psychologique est une conduite vexatoire qui se manifeste par des comportements, des paroles ou des gestes répétés qui :

* sont hostiles ou non désirés

* portent atteintes à la dignité ou à l'intégrité psychologique ou physique du salarié

* rendent le milieu de travail néfaste

Une seule conduite grave peut constituer du harcèlement psychologique si elle a les mêmes conséquences et si elle produit un effet nocif continu sur le salarié. Pour établir qu'il y a bien harcèlement psychologique, il faut démontrer la présence de tous les éléments de la définition.

Source: Commission des normes du travail du Québec