Lorsqu'un travailleur produit une réclamation à la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, l'aspect médical est évidemment au coeur de cette réclamation. Le travailleur demeurera sous les soins du médecin de son choix tant que son dossier sera ouvert.

L'employeur n'est cependant pas sans ressources. En cas de doute sur l'état de santé d'un travailleur, il peut le faire évaluer par un médecin de son choix. Ce droit lui est conféré par l'article 209 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP). L'expert peut se prononcer sur la relation entre l'événement et le diagnostic, sur la date de consolidation ou sur la présence préalable d'une condition personnelle qui aurait été aggravée par l'accident.

Suivant la réception du rapport médical du médecin qu'il a désigné, l'employeur peut, en vertu de l'article 212 de la LATMP, contester le rapport médical du médecin qui a charge du travailleur devant le Bureau d'évaluation médicale (BEM). Soulignons que la CSST peut, elle aussi, contestation l'opinion du médecin du travailleur devant le BEM.

Un rôle d'arbitre

Institué en 1992, le BEM a pour mandat d'évaluer l'état de santé du travailleur et de statuer sur les divergences d'opinion qui existent entre le médecin du travailleur et le médecin désigné par l'employeur ou par la CSST. Afin d'assurer l'impartialité du processus, on a donné la responsabilité au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre de soumettre, au ministre du Travail, avant le 15 mars de chaque année, une liste des professionnels de la santé qui acceptent d'agir à titre de membres du BEM.

C'est donc au BEM que la CSST transmet la contestation de l'employeur et le dossier médical du travailleur. Elle doit cependant en aviser le ministre du Travail et lui transmettre les noms et adresses du travailleur, de l'employeur et des médecins impliqués dans le litige. C'est le ministre qui désigne le membre du BEM habilité à agir dans le dossier en litige.

Un rapport complémentaire est envoyé au médecin traitant pour que ce dernier puisse y confirmer ses conclusions. Ce rapport est aussi communiqué au membre du BEM.

Le membre désigné du BEM doit se prononcer sur un ou plusieurs des cinq points de l'article 212 de la LATMP, soit le diagnostic, la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion, la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits, l'existence ou le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur et l'existence ou l'évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.

Il peut aussi utiliser son pouvoir discrétionnaire pour donner un avis sur chacun des points de l'article 212 même si aucun autre médecin ne s'est prononcé sur l'une ou l'autre de ces questions. Après avoir étudié le dossier et examiné le travailleur, le membre du BEM rend un avis dans lequel il infirme ou confirme les conclusions des deux professionnels de la santé. La CSST est liée par cet avis et doit rendre une décision en fonction des conclusions retenues.

Enfin, comme pour toutes décisions rendues par la CSST, l'employeur et le travailleur peuvent se prévaloir de leur droit de contestation suivant la procédure établie par la Loi. Cependant, une décision rendue par la CSST conformément à un avis du BEM devra ultimement faire l'objet d'un recours devant la Commission des lésions professionnelles, qui est le tribunal administratif de dernière instance, puisque l'instance de révision de la CSST n'a pas le pouvoir de modifier une décision de cette nature.

Chantal Boutin, CRIA, est conseillère, santé et sécurité au travail chez Raymond Chabot SST inc. Dès lundi, vous retrouverez le texte de cet article dans le portail de l'Ordre : www.portailrh.org