En reprenant le contrôle de la marque de vêtements de ski Orage qu'il a fondée, Éric d'Anjou ambitionne d'en relancer les ventes, au beau fixe depuis cinq ans. «On prévoit une croissance de 20% par année. Dans 5 ans, les ventes auront doublé pour atteindre 40 millions», affirme l'entrepreneur, qui avait vendu son bébé à un fonds ontarien en 2009.

Pour arriver à ses fins, le nouveau propriétaire de l'entreprise encore établie à Longueuil veut élargir sa gamme de produits. Depuis sa création en 1989, Orage s'est toujours spécialisée dans les vêtements pour les sports de glisse hivernaux. Une stratégie qui en fait une entreprise saisonnière.

Éric d'Anjou veut désormais vendre une vaste gamme de manteaux plus légers, pouvant être portés l'automne et le printemps pour le plein air ou les balades en ville. «Je veux aussi créer des vêtements qui résistent à l'eau, adaptés au climat plus chaud et plus humide de la côte ouest de l'Amérique. Ça va nous apporter une belle croissance», ajoute ce passionné de ski qui qualifie lui-même son plan de match d'"ambitieux".

«La stratégie semble logique, sinon cohérente, puisqu'il y a une forte synergie avec le champ d'application actuel de l'entreprise. Il faudra voir, par contre, si le capital de marque d'Orage et sa notoriété lui permettront de percer ce marché. J'ai l'impression que le risque serait peut-être plus grand si l'entreprise demeurait uniquement dans les vêtements de neige», commente François Marticotte, expert en commercialisation de la mode et en marketing à l'ESG UQAM.

La marque Orage est distribuée dans plus de 2500 magasins dispersés dans une vingtaine de pays sur quatre continents. Mais elle pourrait élargir encore sa portée, notamment en Russie et en Chine, où la classe moyenne s'enrichit, croit l'entrepreneur de 46 ans. Il veut aussi profiter de la reprise aux États-Unis et se cherchera un partenaire en Europe.

«Pour les Américains, nous avons une saveur européenne. Et pour les Européens, nous avons une saveur américaine. C'est intéressant de provenir d'un îlot francophone sur un continent anglophone. Ça nous donne du pouvoir. Je trouve que nos entreprises n'exploitent pas suffisamment la différence des produits québécois. Pourtant, on a une expertise, un côté créatif et un style uniques.»

S'il n'ose pas dire que l'entreprise Coalision - qui chapeautait jusqu'ici les marques Orage, Lolë et Paradox (vendue chez Costco) - a négligé les vêtements de ski, il convient qu'il y avait «une petite carence avec Orage». Conséquence: sa croissance a été stoppée, tandis que «les deux autres marques ont connu une croissance fulgurante».

«Il n'y avait pas de synergies»

Kilmer Capital Partners, qui avait acquis 70% de Coalision (montant confidentiel) il y a cinq ans, a décidé de revendre la marque Orage à son créateur et au directeur du marketing d'Orage, Mike Nick, «pour se concentrer sur les vêtements de bien-être». Le fonds a conservé les deux autres marques de l'entreprise, qui se ressemblent.

«Nos ressources humaines et financières sont limitées. Alors, c'est difficile pour nous de gérer des marques qui n'ont pas de synergies entre elles», explique le président de Coalision, Bernard Mariette. Tandis que les collections Lolë et Paradox sont distribuées toute l'année, celles d'Orage sont exclusivement vendues l'hiver; les fournisseurs ne sont pas les mêmes car leurs produits diffèrent; Lolë possède ses propres boutiques, ce qui n'est pas le cas d'Orage.

«Ça multipliait tout! lance Bernard Mariette. Les marques partageaient les mêmes services administratifs, mais ça compliquait les choses. Confier la marque à Éric en assure la pérennité.»

«C'est une transition harmonieuse faite dans l'harmonie, ajoute Éric d'Anjou, qui ne cache pas sa joie de revenir à ses anciennes amours. On continue à partager nos locaux et certains services pendant un an. Je ne sais pas si je vais ensuite déménager. Si je le fais, j'aimerais me rapprocher d'une montagne de ski, le plus beau sport du monde!»

Vendus de 250 à 600$ pièce, les vêtements Orage sont dessinés à Longueuil et fabriqués en Asie depuis 1996. «Nous avons un code d'éthique. Nous voulons avoir une belle compagnie, nous ne voulons pas faire d'argent sur le dos d'employés mal traités», mentionne l'entrepreneur.

En plus d'avoir conservé 10% des parts de Coalision, Éric d'Anjou siège au conseil d'administration. Sa conjointe Évelyn Trempe, cofondatrice d'Orage, est vice-présidente, causes sociales et ambassadrice de Lolë.

Orage en bref

Ventes: 20 millions

Points de vente: plus de 2500 sur 4 continents

Employés: 30 à Longueuil, en plus de 20 représentants aux États-Unis et en Europe

Coalision en bref

Ventes: 70 millions

Marques: Lolë et Paradox

Magasins Lolë: 13 dans 5 pays

Employés: 175