Les ventes du temps des Fêtes ne sont pas encore commencées que, déjà, le vieux routier du commerce de détail, Gaston Lafleur, est prêt à faire des gageures: les transactions de fin d'année devraient permettre de compenser la quasi-totalité du recul enregistré ces derniers mois.

«Si on arrivait kif-kif, ce serait bien beau», dit en entrevue le président-directeur général du Conseil québécois du commerce de détail. Ça, c'est son scénario optimiste. Le réaliste, lui, prévoit une baisse des ventes de 1% chez les détaillants pour l'ensemble de l'année par rapport à 2008.

Pour atteindre ce 1%, il faudra que les tiroirs-caisses résonnent joliment dans les prochains mois. Car, de janvier à juillet, les ventes au détail au Québec ont reculé de 2,6%, ce qui est mieux que dans le reste du Canada, selon Statistique Canada.

L'argument de Gaston Lafleur: les ventes ont baissé l'an dernier à partir de l'automne. Les chiffres des prochains mois devraient donc montrer une hausse, puisque les mois de comparaison sont plus faibles.

La logique se tient. Pour la réalité, Yves DesGroseillers, président et chef de la direction de Groupe BMTC (Brault&Martineau et Ameublements Tanguay), est plus sceptique.

Oui, dit-il, la baisse de ses ventes a commencé dans les trois derniers mois de l'an dernier, une diminution qui s'est poursuivie pendant les deux premiers trimestres de 2009.

Si M. DesGroseillers ne prédit pas de hausse pour le trimestre en cours, ce n'est pas seulement parce que son entreprise est cotée en Bourse et qu'il aime se faire très discret. Cela tient plus des produits qu'il vend pendant la période des Fêtes: surtout de l'électronique.

Or, quiconque a mis les pieds dans un magasin d'électronique ces derniers mois a pu constater que les prix baissent. «Pour faire le même chiffre d'affaires que l'an passé, il faut en vendre beaucoup plus», dit-il, en parlant des écrans plats.

Des vols

Gaston Lafleur en saura plus sur l'attitude des Québécois quand son organisme aura terminé son enquête annuelle sur leurs intentions d'achat, qui sera rendue publique en novembre. Hier, c'est un autre sondage qui le préoccupait, celui sur les pertes liées aux vols et méfaits chez les détaillants québécois.

Un chiffre: 881,4 millions de dollars. Il s'agit des pertes estimées des détaillants l'an dernier, soit 1,4% du total des ventes. «Le bénéfice net de plusieurs entreprises est souvent inférieur à ça», déplore-t-il.

Les pertes liées aux vols par les employés sont légèrement supérieures à celles des vols des clients.

L'exemple de Jean Coutu

Chez Jean Coutu, pour faire face aux vols - qui varient beaucoup d'un magasin à l'autre - on a adopté une série de mesures ces dernières années. «On travaille beaucoup avec la vidéo», explique Hélène Bisson, porte-parole du groupe.

Les vidéos acheminées dans les succursales mettent en scène des scénarios qui devraient attiser la vigilance des employés. En plus, on a installé des dispositifs antivols sur les produits plus chers: des puces qui sonnent quand le client passe la porte sans les avoir payés ou des tiroirs bruyants où les consommateurs doivent aller chercher les lames de rasoir.

Malgré l'ampleur du phénomène des vols, à peine un cas sur deux est renvoyé aux tribunaux, selon le sondage du CQCD. Une des raisons: le système judiciaire ne serait pas assez sévère avec les accusés, surtout ceux qui se font prendre pour la première fois. Le processus de non-judiciarisation «vient banaliser le problème du vol à l'étalage», déplore M. Lafleur.