Le taux de chômage du Canada est redescendu à 5,8 % le mois dernier, son taux le plus bas en quatre décennies. Mais même si le marché de l'emploi peine à trouver des travailleurs, la croissance des salaires continue de ralentir, a indiqué vendredi Statistique Canada.

Dans sa dernière enquête sur la population active, l'agence fédérale a indiqué qu'un gain net de 11 200 emplois avait été enregistré en octobre, incluant 33 900 postes à temps plein, mais que les chiffres étaient trop faibles pour qu'elle les considère comme significatifs du point de vue statistique.

Le taux de chômage avait été de 5,9 % en septembre, et son recul était largement attribuable au fait qu'un moins grand nombre de personnes étaient à la recherche d'un emploi. À 5,8 %, il renouait avec son plus bas niveau en 40 ans, ce qu'il a fait à sept reprises dans les 12 derniers mois.

Un nouvel élément, en particulier, devrait attirer l'attention de la Banque du Canada : la croissance des salaires.

La banque centrale surveille cet indicateur avant de prendre ses décisions en matière de taux d'intérêt. Or, malgré le resserrement du marché du travail, la croissance des salaires a ralenti pour un cinquième mois consécutif. Une croissance solide des salaires peut exercer une pression à la hausse sur l'inflation, qui peut ensuite influer sur les décisions de la Banque du Canada dans sa politique monétaire.

La croissance du salaire horaire moyen sur douze mois a reculé à 2,19 %, son plus bas niveau depuis septembre 2017. Des experts avaient prédit que la croissance des salaires accélérerait, compte tenu du resserrement du marché du travail, mais elle a diminué chaque mois depuis mai, alors qu'elle s'était établie à 3,94 %.

Hausse de taux moins probable en décembre

Du côté des employés permanents, la croissance des salaires du mois dernier n'a été que de 1,9 % sur un an - ce qui est inférieur à l'inflation, a noté l'économiste Brian DePratto, de la Banque TD.

« Le taux des salaires se démarque nettement », a souligné M. DePratto, estimant que ce chiffre réduirait la probabilité de voir la Banque du Canada procéder à une nouvelle hausse de son taux d'intérêt directeur en décembre.

M. DePratto s'attend à ce que la banque centrale attende jusqu'en janvier avant sa prochaine hausse.

D'autres analystes ont également souligné la faible croissance des salaires dans le rapport de vendredi comme une éventuelle raison pour la Banque du Canada de ne pas bouger en décembre.

« La décélération de la croissance des salaires constitue le principal risque à la baisse pour la Banque du Canada en ce qui a trait à ses hausses de taux », a expliqué Carlos Capistran, économiste de la Bank of America Merrill Lynch, dans une note de recherche.

Josh Nye, économiste principal de la Banque Royale, a écrit dans une note : « Nous pensons que la croissance des salaires sera essentielle pour accélérer le rythme de la hausse des taux. »

La banque centrale a haussé la semaine dernière son taux directeur pour la cinquième fois depuis l'été 2017. Son gouverneur, Stephen Poloz, a également signalé que les hausses futures pourraient survenir plus rapidement que prévu.

Cette semaine, M. Poloz a indiqué aux législateurs d'Ottawa que les Canadiens devaient se faire à l'idée que des taux d'intérêt de 3 % seraient la nouvelle normalité, maintenant que l'ère des très faibles coûts d'emprunt s'estompait progressivement.

La banque centrale estime que son taux directeur devra progressivement grimper pour s'établir entre 2,5 % et 3,5 %, afin d'éviter une inflation trop élevée. Le taux est maintenant de 1,75 %.

Reste à savoir à quelle vitesse cette hausse aura lieu.

Plus d'emplois dans le secteur privé

Ailleurs dans son rapport, Statistique Canada a indiqué que, par rapport à l'an dernier, l'emploi national avait augmenté de 1,1 % en octobre, avec l'ajout de 205 900 postes, dont 173 000 à temps plein.

Le secteur privé a créé 20 300 emplois le mois dernier, tandis que le secteur public en a perdu 30 800. Parmi les nouveaux emplois, 21 800 se situaient dans la catégorie du travail autonome, classification qui inclut les personnes travaillant dans une entreprise familiale sans rémunération.

La Saskatchewan a créé 2500 emplois en octobre, mais les niveaux d'emploi sont demeurés pratiquement inchangés dans les autres provinces.

Les industries productrices de biens ont perdu 12 000 emplois le mois dernier, une baisse alimentée par la disparition de 7100 postes dans le secteur des ressources naturelles.

Du côté des industries productrices de services, quelque 23 200 emplois ont vu le jour en octobre, notamment grâce à un gain de 22 000 postes dans les services aux entreprises, les services relatifs aux bâtiments et les autres services de soutien.

Selon les résultats d'une étude publiée le mois dernier par la Banque du Canada, les entreprises jugent, dans l'ensemble, que les pénuries de main-d'oeuvre se sont aggravées au cours des 12 derniers mois.