L'opposition accuse le gouvernement libéral d'entretenir des liens trop étroits avec le secteur privé pour la création de la Banque d'infrastructure du Canada.

Le Globe and Mail révélait vendredi matin que des employés de la firme d'investissement BlackRock auraient conseillé des hauts fonctionnaires et des attachés politiques sur le contenu d'une présentation que le ministre des Infrastructures, Amarjeet Sohi, devait faire auprès des clients de cette firme.

BlackRock est l'un des investisseurs qui pourraient financer des projets par l'entremise de la Banque d'infrastructure du Canada.

Le Parti conservateur, le Nouveau Parti démocratique et le Bloc québécois y voient un conflit d'intérêts.

Le bloquiste Gabriel Ste-Marie a affirmé vendredi que BlackRock est «juge et partie» dans la création de la Banque d'infrastructure du Canada.

«Dans la plateforme électorale des libéraux, l'idée de cette banque-là, c'était d'aider les municipalités à emprunter pour leurs infrastructures à des taux d'intérêt plus avantageux, a-t-il rappelé.

«Là, c'est de venir offrir des garanties de prêt aux entreprises privées, aux banques d'investissement, aux fonds d'investissement comme BlackRock, qui est juge et partie», a-t-il ajouté.

Le député conservateur Pierre Poilievre craint que les «mieux nantis» puissent ainsi en profiter pour s'enrichir aux dépens des contribuables.

«C'est le rôle du gouvernement de protéger les intérêts des contribuables, mais c'est le rôle de ces investisseurs de recevoir une rente en minimisant leur risque», a-t-il expliqué.

«Ce que les libéraux sont en train d'établir avec la Banque d'infrastructure, c'est de séparer le risque et le profit. Les contribuables auront le risque et le secteur privé aura le profit», a-t-il continué.

Le député néo-démocrate Alexandre Boulerice va plus loin. Il accuse le gouvernement Trudeau d'être devenu «l'instrument de certains groupes financiers extrêmement puissants» pour créer une structure d'investissement qui correspond à «leurs intérêts».

«En ce moment, le gouvernement libéral ressemble à une marionnette manipulée par de puissants groupes financiers qui ont des intérêts directs dans le fait d'investir et de tirer bénéfice dans ces infrastructures-là sur le dos des gens qui vont probablement avoir des péages et des frais d'utilisation», a-t-il dit.

«Comment, sinon, ces infrastructures-là vont-elle dégager des profits, puis des rendements pour les investisseurs privés?», a-t-il demandé.

«Ça c'est des suppositions, puis je pense que les gens s'affolent un peu», a répondu le secrétaire parlementaire du ministre des Infrastructures, Marc Miller.

«Il y a des partis d'opposition qui ont pas confiance dans le secteur privé, a-t-il ajouté. Nous, on fait confiance quand ça se doit, et c'est un outil parmi tant d'autres pour investir dans notre projet historique d'infrastructure.»

Le gouvernement veut créer la Banque d'infrastructure du Canada pour permettre à des investisseurs privés de financer certains projets et ainsi stimuler la croissance économique. Un montant de 15 milliards proviendrait des fonds publics.

«Prix de consolation» pour Montréal ?

Le Bloc québécois se demande si Montréal pourra réellement obtenir le siège social de la Banque d'infrastructure du Canada comme l'espérait le milieu financier de la métropole.

La ministre du Développement international, Marie-Claude Bibeau, a annoncé vendredi que les bureaux du nouvel Institut de financement du développement seront établis à Montréal. Cet institut recevra 300 millions au cours des cinq prochaines années pour attirer des investissements privés dans les pays en voie de développement.

Le député bloquiste Ste-Marie estime qu'il pourrait s'agir d'un «prix de consolation».

«La Banque d'infrastructure, nous on est contre son principe parce que c'est une banque de privatisation des infrastructures, mais au moins, ça devait revenir à Montréal. Le milieu s'était mobilisé. Là des »peanuts« en compensation, ça m'étonnerait pas que ça soit ça», a-t-il soutenu.