La nouvelle ministre canadienne du Commerce international, Chrystia Freeland, s'est engagée à mener une consultation sur l'internet auprès des Canadiens pour leur permettre de se familiariser avec le Partenariat transpacifique (PTP) et de faire connaître leurs préoccupations.

Elle a aussi réitéré l'intention de son gouvernement de tenir un débat parlementaire sur le PTP. «Nous croyons au commerce international, a-t-elle rappelé. Ceci dit, un vrai leitmotiv du gouvernement Trudeau sera la consultation. Et ce n'est pas arrivé jusqu'ici avec cette entente.»

Les gouvernements signataires de l'accord transpacifique ont dévoilé le texte de l'entente de libre-échange dans les 48 dernières heures. Il faudra plusieurs jours avant de tout décoder ce qu'on trouve dans ce document de près de 1000 pages qui a pour objectif d'éliminer à terme 98% de tous les tarifs de douane touchant le commerce entre les 12 pays signataires de l'accord.

La ministre Freeland a promis de publier le texte de l'entente sur le site web de son ministère dès qu'il sera traduit en français.

L'accord aborde des questions autrefois laissées en plan par les accords de libre-échange. Par exemple, des chapitres du PTP portent sur l'environnement et le droit du travail. Une section traite plus spécifiquement des PME. Des dispositions sont prévues pour assurer plus de transparence dans le mécanisme de règlement des différends. À chaud, des experts ont commenté des dispositions de l'accord qui ont attiré leur attention.

Produits laitiers étrangers

Une annexe de l'accord précise les menus détails des importations de produits laitiers en franchise de douane au cours des 20 premières années suivant la mise en oeuvre du traité. «L'information qui est rendue publique aujourd'hui est essentiellement en ligne avec l'information qui avait été partagée avec l'industrie sur une base confidentielle», dit Yves Leduc, directeur Politiques et commerce international des Producteurs laitiers du Canada.

L'accord donne un accès équivalent à 3,25% de la production de matières grasses au Canada de 2016. «Dans le pire des scénarios, l'accès irait jusqu'à 4% de la production de 2016», précise M. Leduc.

Plus de transparence

L'accord reprend essentiellement le même mécanisme de règlement des différends investisseurs-États (Investor-State Dispute Settlement) que l'on trouve dans l'accord de libre-échange nord-américain (ALENA), soit la formation d'un groupe d'experts ad hoc composé de trois personnes. Néanmoins, le mécanisme sera cette fois-ci plus transparent. À titre d'exemple, les audiences du groupe seront publiques et les tierces parties pourront intervenir auprès du panel. «On dote les pays d'un processus plus rapide que ce qu'on a avec l'ALENA ou l'Organisation mondiale du commerce», souligne Sylvain Charlebois, professeur de marketing à l'Université Guelph.

Un comité sur les PME

Pour la première fois, un accord de libre-échange consacre un chapitre aux PME. L'accord prévoit la création d'un comité formé par les pays signataires qui verrait à trouver les façons d'aider les PME des 12 pays à tirer avantage des occasions d'affaires découlant du traité. Il est notamment question d'aider les PME à s'intégrer dans les chaînes mondiales d'approvisionnement des grands donneurs d'ordre.

«Ce sont de bonnes choses, mais il faudra voir l'usage», dit au téléphone Simon Gaudreault, économiste principal à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

Commerce électronique

L'accord empêche les pays signataires d'obliger les entreprises virtuelles à avoir leurs serveurs ou toute autre infrastructure dans le pays pour y avoir le droit de faire du commerce. Une disposition qui rassurera les PME de la nouvelle économie qui ont des visées extraterritoriales.

Une autre disposition interdit aux pays d'imposer des frais de douane sur les produits téléchargés électroniquement en provenance de l'un des pays signataires.

Droit du travail et sur l'environnement

L'accord englobe un chapitre sur le droit du travail et un autre sur l'environnement, ce qu'on ne trouve pas dans l'ALENA. Le texte stipule notamment que les pays signataires doivent protéger la liberté d'association des travailleurs et interdire l'exploitation des enfants au travail.

Le chapitre sur l'environnement prévoit des outils pour combattre le trafic d'animaux et d'espèces sauvages. D'autres dispositions interdisent le recours aux types de subventions les plus dommageables en ce qui a trait à la pérennité des ressources halieutiques.

Extension de la durée du droit d'auteur

L'entente comprend un chapitre sur la propriété intellectuelle. Le Canada a en outre signé des ententes parallèles sur le sujet avec sept pays du PTP. Tout ça prendra du temps à décortiquer. Soulignons toutefois que l'accord prévoit une extension de 20 ans de la durée du droit d'auteur sur une oeuvre suivant le décès de son auteur. Une oeuvre appartiendra au domaine public 70 ans après la mort de son auteur plutôt que 50 ans, comme c'est le cas actuellement.

Dans son blogue, le professeur de droit Michael Geist, de l'Université d'Ottawa, déplore cette disposition, qui retardera l'entrée dans le domaine public d'oeuvres d'auteurs marquants comme Germaine Guèvremont et Gabrielle Roy.