Des ministres fédéraux et des défenseurs de l'industrie pétrolière partent en guerre contre les bananes Chiquita. La multinationale de l'agroalimentaire a annoncé la semaine dernière qu'elle n'utiliserait plus de carburant produit à partir des sables bitumineux canadiens.

Chiquita Brands International a adopté cette mesure pour réduire son empreinte écologique. Une quinzaine d'entreprises participent à cette campagne lancée par le groupe Forest Ethics, notamment Avon, Gap, Levi Strauss et les pharmacies Walgreen.

Dans la foulée de l'annonce, le premier ministre Stephen Harper s'est porté à la défense de l'industrie pétrolière, la semaine dernière. Deux ministres, Rona Ambrose et Jason Kenney, lui ont emboîté le pas ce week-end.

«Je déduis que les bananes Chiquita n'ont aucun problème avec le pétrole iranien, mais boycottent le pétrole canadien, a écrit M. Kenney sur son compte Twitter. Plus de bananes Chiquita pour moi.»

Le blogue EthicalOil.org, lui, appelle carrément au boycottage de la célèbre marque de bananes. L'organisme se décrit comme un «mouvement citoyen» qui décrit le pétrole canadien comme étant le seul à être «éthique» parce qu'il n'est pas produit par des régimes oppressifs pour les femmes. Il s'est payé une campagne radiophonique pour appuyer sa campagne.

«Qu'on aime le pétrole ou pas, la réalité est qu'on a besoin de pétrole, explique Kathryn Marshall, l'animatrice du blogue. Et le Canada développe du pétrole d'une manière responsable pour l'environnement.»

Selon elle, la société Chiquita est bien mal placée pour faire la morale aux Canadiens. Anciennement appelée la United Fruit Company, elle a été associée à une ribambelle d'entorses aux droits humains au fil des décennies.

En 2007, elle a été condamnée à payer 25 millions pour avoir versé des centaines de milliers de dollars à des groupes paramilitaires en Colombie. L'entreprise a toujours maintenu qu'il s'agissait d'une forme d'extorsion et qu'elle avait accepté de payer ces sommes pour protéger ses employés.

L'Union européenne souhaite reconnaître que le transport du pétrole provenant des sables bitumineux génère 22% plus de gaz à effet de serre que celui du pétrole traditionnel, souligne le directeur de Forest Ethics, Todd Paglia. Et le président Barack Obama a récemment mis sur la glace le projet controversé du pipeline Keystone, par lequel le pétrole albertain serait acheminé vers les raffineries du sud américain.

«Le monde entier dit non aux sables bitumineux et la réaction du Canada, c'est de boycotter les bananes Chiquita, dénonce M. Paglia. C'est complètement fou.»