La crise de la dette souveraine et du secteur bancaire en Europe, ainsi que la faible reprise aux États-Unis forcent le ministre des Finances Jim Flaherty à refaire ses calculs: le déficit, qu'il croyait pouvoir éliminer en 2014-2015 il y a à peine quatre mois, sera finalement réduit à néant un an plus tard.

Pour y arriver, le gouvernement Harper devra être ferme dans sa volonté de comprimer les dépenses annuelles de l'État de quatre milliards de dollars à partir de 2014-2015.

Ces compressions, qui seront annoncées dans le prochain budget en février, permettront de réduire le déficit à seulement 3,5 milliards de dollars en 2014-2015 et à produire un premier surplus en huit ans, environ 600 millions, durant l'exercice financier suivant.

Dans son dernier budget, déposé en juin, le ministre Flaherty projetait un excédent budgétaire de 1,2 milliard de dollars en 2014-2015. En moins de six mois, donc, les perspectives de croissance de l'économie mondiale se sont assombries de manière marquée, a souligné hier Jim Flaherty en faisant sa mise à jour économique et financière à Calgary.

Les dernières projections des économistes du secteur privé, sur lesquelles le ministre des Finances fonde ses calculs, tablent sur une croissance économique de 2,2% en 2011 et 2,1% en 2012, soit 0,7% de moins que prévu en juin durant ces deux années. Cette croissance moins importante privera le Trésor fédéral de 13 milliards de dollars en revenus en deux ans.

Le déficit, qui frisera les 31 milliards en 2011-2012, sera donc ramené à 26,4 milliards en 2012-2013, à 15 milliards en 2013-2014 et à 3,5 milliards en 2014-2015.

La dette accumulée, elle, atteindra un sommet de 640 milliards de dollars une fois qu'Ottawa aura renoué avec l'encre noir en 2015-2016, soit une augmentation spectaculaire de 183 milliards de dollars en sept ans.

«Nous sommes bien conscients des défis que devra relever l'économie mondiale et de l'impact qu'ils pourraient avoir sur le Canada. [...] Le gouvernement est toujours sur la bonne voie pour supprimer le déficit à moyen terme», a affirmé le ministre Flaherty dans un discours devant la Chambre de commerce de Calgary.

Il a dit espérer que le sommet du G20 tenu à Cannes la semaine dernière forcera les dirigeants européens à mettre en oeuvre des plans d'austérité requis pour régler la crise de la dette souveraine qui pèse lourd sur l'économie mondiale.

Dans l'intervalle, le ministre Flaherty a promis que le gouvernement Harper n'hésitera pas à adopter des mesures ciblées pour protéger l'économie canadienne et la création d'emplois.

«Nous ne nous enfermerons pas dans un carcan idéologique lorsqu'il faudra prendre des décisions pour conserver la vigueur de notre économie et protéger les Canadiens, leur sécurité financière et leurs emplois», a-t-il dit.

Le ministre a d'ailleurs confirmé qu'Ottawa limitera la hausse des cotisations d'assurance-emploi des employés à 5 cents par tranche de 100$ de gain assurable en 2012 au lieu des 10 cents prévus à l'origine. Dans le cas des employeurs, la hausse sera aussi limitée à 7 cents au lieu des 14 cents prévus. À elle seule, cette mesure coûtera 600 millions de dollars au fisc en 2012.

Travail partagé

En outre, le gouvernement Harper a décidé de prolonger jusqu'en octobre 2012 la bonification du programme de travail partagé, qui a permis de stabiliser le marché de l'emploi au cours des trois dernières années.

Cela dit, le ministre a tenu à souligner que le Canada a réussi à bien tirer son épingle du jeu malgré les turbulences économiques des derniers mois. Rappelant que le Canada est le seul pays à avoir recouvré plus que la totalité des emplois perdus durant la récession mondiale - 600 000 emplois ont été crées depuis la fin de la crise au pays - M. Flaherty a affirmé que la réduction du taux d'imposition des entreprises favorisera l'investissement et la création d'emplois.

Mais la chef du NPD, Nycole Turmel, a soutenu que le gouvernement Harper ignore les besoins des familles en maintenant le cap sur la réduction du fardeau fiscal des entreprises au lieu de proposer un nouveau plan de relance.

«Il est temps de passer à l'action pour créer des emplois et non de continuer à réduire les impôts des grandes entreprises qui ne font rien pour améliorer l'état du marché du travail», a-t-elle dit.

Les projections des économistes, sur lesquelles Ottawa fonde ses calculs, tablent sur une croissance économique de 2,2% au Canada en 2011 et de 2,1% en 2012, soit 0,7% de moins que prévu en juin pour ces deux années.

Pour atteindre ses objectifs financiers, le gouvernement Harper devra comprimer les dépenses annuelles de l'État de 4 milliards à partir de 2014-2015

Les compressions envisagées par Ottawa permettront de réduire le déficit à 3,5 milliards de dollars durant l'exercice financier actuel et à produire un premier surplus en huit ans, à quelque 600 millions, en 2015-2016.