Les régimes de retraite canadiens ont réalisé en moyenne un confortable rendement d'environ 10% en 2010, mais cela reste quand même insuffisant pour améliorer leur solvabilité.

La bulle, qui a fortement dopé le marché obligataire durant le printemps et l'été, aura poussé encore une fois à la baisse les taux d'intérêt sur les obligations canadiennes de longue échéance. Elles servent de mesure étalon de la valeur des engagements à long terme des régimes. Celle-ci a malheureusement augmenté plus vite que n'aura progressé l'actif.

«Le degré de solvabilité médian des caisses de retraite en observation au Canada s'établit à 83% au 31 décembre 2010, comparativement à 86% au 31 décembre 2009, précise Claude Lockhead, vice-président principal chez Aon Hewitt. Environ 89% des régimes sont en situation de déficit de solvabilité au 31 décembre 2010, comparativement à 84% au 31 décembre 2009.» Ce, en dépit des paiements d'amortissement effectués par les employeurs pour les renflouer.

L'étude d'Aon Hewitt est fondée sur un échantillon de près de 400 régimes canadiens.

Au 31 décembre 2009, les obligations 30 ans assuraient un rendement de 5,4%. Un an plus tard, ce n'était plus que 5,07%. Pour les échéances de 10 ans, les rendements étaient respectivement de 3,9% et 3,3%.

Un écart d'un point de pourcentage peut faire varier de jusqu'à 15 points de pourcentage la valeur du passif. Comme les régimes de retraite sont structurés par les actuaires avec une hypothèse de rendement de 6 à 6,5% en tenant compte des augmentations de salaire, le recul des taux obligataires a plus qu'effacé l'excédent de revenu généré par les placements.

«Les caisses qui devront procéder à une évaluation actuarielle au 31 décembre 2010 seront ainsi touchées par l'augmentation du passif», déplore Jean Bergeron, associé chez Morneau Shepell. (Il s'agit de la nouvelle raison sociale de la fiducie de revenus Morneau Sobeco qui s'est transformée en société par actions, en début d'année.)

Mince consolation, ajoute M. Bergeron, pour le calcul du passif des retraités d'un régime, on utilise le taux d'une rente calculée par les compagnies d'assurances. Ce taux est passé de 4,49% à 4,58%.

C'est donc dire qu'un régime qui compte un grand nombre de retraités aura été moins frappé par la baisse des taux obligataires.

Ces régimes à maturité élevée ont aussi souvent une politique de placement qui privilégie une lourde pondération en obligations, qui plus est, en obligations de longue durée.

Cela les aura sans doute favorisés, côté rendement. L'indice obligataire DEX Univers montre un gain convenable de 6,7% pour l'année, mais sa composante Long terme affiche plutôt 12,5%.

La solide performance du marché obligataire, concentrée au cours des trois premiers trimestres, aura permis aux régimes lourdement investis en obligations de ne pas se différencier de ceux qui misent surtout sur les actions et qui ont davantage profité du rallye boursier.

Selon le portefeuille de référence Morneau Shepell, un régime investi à 55% en titres à revenus fixes et 45% en actions aura obtenu un rendement indiciel de 9,9%, alors que celui dont le partage est plutôt de 40% et 60% s'en est tiré avec un gain de 9,8%.

Ces chiffres ne tiennent pas compte de l'apport de la gestion active, qui éloigne souvent les rendements des indices de référence, ni des frais exigés par un gestionnaire.

Les actions canadiennes ont encore généré les meilleurs gains, puisque l'indice de référence S&P/TSX a bondi de 17,6%. Les caisses qui ont placé une partie de leurs avoirs dans les sociétés à petite capitalisation ont sans doute réalisé une plus-value intéressante: l'indice BMO petite capitalisation pondérée a enregistrée une poussée de près de 40%.

Les actions américaines ont aussi très bien fait. L'appréciation de 5,4% du huard face au billet vert, survenue surtout au quatrième trimestre, a cependant limité le rendement en dollars canadiens du S&P 500 à 8,9%.

Les résultats réels des caisses varieront enfin beaucoup selon le type de placements retenu en actions internationales. Celles qui ont parié sur les grandes capitalisations d'Europe, d'Asie et d'Extrême-Orient s'en tirent avec un gain médiocre. Celles qui ont osé les pays émergents ont été en revanche bien récompensées.

PERFORMANCE INDICIELLE

4e trimestre / 2010

Bons du Trésor 0,224 /0,5

Obligations (DEX Univers) -0,712/ 6,7

Actions canadiennes (S&P/TSX) 9,45/ 17,6

Actions américaines (S&P 500)* 7,28/ 8,9

Europe Asie Extrême-Orient (MCSI)* 3,307/ 2,1

Marchés émergents (MCSI)* 3,994/ 12,9

Obligations long terme -1,2/ 12,5

Actions canadiennes BMO pet. cap. 19,8 /38,5

*En dollars canadiens

Sources. Banque Nationale, Morneau Shepell