Malgré un faible volume d'échanges, le huard a poursuivi hier son ascension inéluctable vers la parité avec le billet vert dont il frôle désormais la tranche.

Peu après midi, il est grimpé à 99,90 cents US avant de se replier quelque peu par la suite. Il a tout de même terminé la séance à 99,72 cents US d'équivalence, en hausse de 55 centièmes.

«Si on y était allé, ça n'aurait pas été très significatif», estime Frédéric Mayrand, premier vice-président responsable des ventes, marchés des changes chez BNP Paribas Canada.

Ce n'est toutefois plus qu'une question de jours.

Beaucoup de spéculateurs détiennent des options de vente du dollar canadien qui deviennent caduques avec la parité. Ces parieurs ont beaucoup acheté de dollars américains avec des dollars canadiens dans le but de ralentir la montée du huard.

«Il existe un gros support technique quand le huard s'approche des 99,5 cents US», renchérit François Bélanger, directeur général, marché des devises, chez BMO Marchés des capitaux.

Depuis la publication des données sur la croissance de 0,6% du produit intérieur brut (PIB) en janvier, jeudi, aucune statistique canadienne n'est venue soutenir notre monnaie. Les négociateurs sur les marchés de change parient néanmoins déjà sur de bons chiffres de l'emploi, en mars, que Statistique publiera vendredi. Les économistes s'attendent à ce que l'Enquête sur la population active révèle la création de 20 000 à 25 000 emplois.

Vendredi saint, le Bureau américain du travail a fait état de 162 000 nouveaux emplois, dont 123 000 dans le secteur privé. Il s'agissait du meilleur chiffre en trois ans.

En plus, les enquêtes ISM auprès des décideurs d'achat des secteurs manufacturiers et des services font toutes deux ressortir un niveau d'activité fortement à la hausse. Cela indique que la reprise, naguère perçue comme fragile, repose de plus en plus sur des assises solides. «Cela met aussi la table pour une heureuse surprise aux chapitres de la croissance et de la rentabilité pour la première moitié de l'année», estime Stéfane Marion, stratège et économiste en chef à la Financière Banque Nationale.

La faiblesse des exportations canadiennes était le seul obstacle à la montée du huard. Elle paraît fondre aussi vite que la neige sur les pentes de ski, au cours du week-end pascal.

Les deux monnaies qui font meilleure figure contre le billet vert depuis le début de l'année sont le huard et le peso mexicain. Les deux partenaires des États-Unis dans l'Accord de libre-échange nord-américain profitent de leur unité douanière et de l'appétit insatiable des Américains et de leurs fonds spéculatifs pour l'or noir.

Le Canada et le Mexique sont les deux principaux fournisseurs de pétrole des États-Unis. Hier encore, le baril de brut a gagné plus de 1,60$US et se négociait au-dessus des 86$ US. En décembre 2008, il était tombé sous la barre des 34$US.

Le dollar canadien a un autre atout sur le marché des devises. Personne ne doute plus de l'imminence d'un resserrement de la politique monétaire par la Banque du Canada. C'est au plus tard en juillet, dès juin selon certains.

La Réserve fédérale (Fed) est toujours engagée à maintenir son taux directeur dans une fourchette de 0 à 25 centièmes «pour une période prolongée».

Le 18 février, certains avaient spéculé qu'elle passerait à l'action avant longtemps après l'annonce d'un relèvement de 25 centièmes du taux d'escompte, à 75 centièmes. Le taux d'escompte est celui auquel elle prête aux institutions financières alors que les Fed Funds, son taux directeur baromètre, est celui qu'elle cible comme rémunération pour les prêts d'un jour que les institutions financières se font entre elles.

Hier, au cours d'une réunion de routine, la Fed a maintenu son taux d'escompte à 75 centièmes, ce qui ne peut qu'aider le huard au cours des prochains jours.

Notre devise va aussi continuer de s'apprécier contre les grandes devises en difficulté, nommément l'euro et la livre sterling.