Bonne nouvelle pour les propriétaires de maison: la Banque du Canada n'a toujours pas l'intention d'augmenter ses taux d'intérêt à brève échéance, malgré le raffermissement de l'économie. La raison: la force du dollar.

La nouvelle annoncée hier pouvait paraître prévisible, mais elle ne l'est pas. Ces derniers temps, de plus en plus d'observateurs s'attendaient à une hausse plus hâtive du taux directeur de la Banque du Canada. La remontée de la Bourse, mais surtout la hausse des taux d'intérêt en Australie, laissait présager cette volte-face de la Banque.

Hier, le communiqué de la Banque a donc surpris les marchés. La stabilité plutôt que la hausse éventuelle des taux d'intérêt rend le dollar canadien moins attrayant. Le huard a ainsi perdu près de 2 cents face à la devise américaine, hier, à 95,29 cents US.

Rappelons que, dans la foulée de la crise financière, en avril, le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, avait annoncé le gel du taux directeur à 0,25% jusqu'à la fin du deuxième trimestre de 2010. Hier, la Banque a réitéré cet objectif, bien que certains économistes voyaient les taux monter dès le printemps ou pressentaient une hausse marquée dès juillet 2010.

La Banque du Canada est celle qui influence ultimement les taux d'intérêt à court terme des banques.

Par exemple, le taux privilégié des banques - celui offert à leurs meilleurs clients - est actuellement de 2,25%, un creux historique.

L'annonce d'hier est donc une bonne nouvelle pour les propriétaires qui renouvellent prochainement leur hypothèque ou pour ceux qui ont un taux ou une marge de crédit variable. Les entrepreneurs dont le taux d'intérêt d'emprunt varie avec le taux privilégié sont également choyés.

Hier, la Banque a indiqué que la vigueur persistante du dollar canadien et sa volatilité ont pour effet de «ralentir la croissance et de contenir les pressions inflationnistes. La Banque estime qu'avec le temps, la force actuelle du dollar viendra plus que contrebalancer les effets de l'évolution positive observée depuis juillet».

Croissance plus forte

Selon la Banque, la croissance de l'économie sera plus forte que prévu au second semestre de 2009, mais elle sera légèrement moins rapide qu'attendu par la suite.

Il s'agit d'un changement par rapport au communiqué précédent, le 10 septembre, où il était question du «risque» que constituait la vigueur du dollar plutôt que de la certitude des effets néfastes du dollar.

«La déclaration de la Banque remet les pendules à l'heure. Il n'y a pas lieu de penser qu'il y aura un resserrement précoce de la politique monétaire au moins jusqu'en juin 2010. Le Canada n'est pas l'Australie», dit l'économiste Martin Lefebvre, du Mouvement Desjardins.

Le dollar nuit

Selon M. Lefebvre, les récentes statistiques économiques viennent confirmer les effets néfastes de la montée rapide du dollar. Par exemple, en août, le déficit commercial du Canada avec les autres pays a atteint 2 milliards de dollars, le niveau le plus élevé de l'histoire. Les temps sont durs pour les exportateurs.

L'économiste principal de la Banque Royale, Robert Hogue, estime que les propos de la Banque lancent le signal que les taux ne remonteront pas rapidement après juin 2010.

Selon la Banque, l'économie canadienne devrait progresser de 3% en 2010 et de 3,3% en 2011, après s'être contractée de 2,4% cette année. «L'écart de production se sera résorbé au troisième trimestre de 2011, soit un trimestre plus tard qu'elle ne l'estimait en juillet.»

La Banque du Canada s'attend également à ce que l'inflation «regagne la cible des 2% au cours de la même période», soit un trimestre plus tard que prévu.