Les acquisitions vont bon train pour Saputo. Le transformateur pourrait mettre la main sur une entreprise cotée en Bourse du Royaume-Uni d'ici un mois, a annoncé hier Lino Saputo Jr lors d'une allocution devant le Cercle canadien de Montréal. Ce serait la huitième de l'entreprise depuis 2015.

En entrevue, plus tard, le président du conseil et chef de la direction de Saputo s'est fait demander pourquoi son entreprise lorgnait le Royaume-Uni alors que les climats politique et d'affaires sont incertains ? 

« On n'a pas choisi le Royaume-Uni, mais l'entreprise qui est dans ce pays, répond Lino Saputo Jr. Il faut comprendre que 100 % du lait qu'elle achète vient du Royaume-Uni et 97 % des produits vendus le sont à des consommateurs du Royaume-Uni. Il n'y a donc pas l'impact du Brexit avec cette entreprise comme il pourrait y en avoir pour d'autres. »

L'offre pour cette entreprise, dont Saputo ne peut dévoiler encore le nom, est faite. « On en est au vote des actionnaires qui devrait passer au début d'avril, explique Lino Saputo Jr. Si tout va bien, je touche du bois, l'entente devrait être conclue à la mi- ou la fin avril. »

Saputo considère parallèlement d'autres acquisitions aux États-Unis, en Amérique latine et en Océanie. Une stratégie de croissance qui lui sourit.

Des revenus de 3,58 milliards

Selon les plus récents résultats de l'entreprise, dévoilés en février, ses revenus ont augmenté de 18,4 % sur un an pour s'établir à 3,58 milliards de dollars au troisième trimestre 2018. Encore une fois, « les revenus ont augmenté en raison de l'apport des récentes acquisitions », lit-on dans une communication de l'entreprise.

En conférence, Lino Saputo Jr a raconté comment l'entreprise avait appris à peaufiner ses processus d'acquisition depuis sa toute première, en 1997, lorsqu'elle est devenue publique. 

« On n'était pas si efficaces au départ, a-t-il avoué. En 1997, on a acheté une entreprise de deux fois notre taille... et on n'était pas prêts. On a appris beaucoup. On y allait au pif pour prendre les décisions. Ça peut fonctionner une fois, mais pas plus. Il a fallu développer un modèle. Le processus de vérification nécessaire (« due diligence ») est la clé. Il faut d'abord visiter les installations. Toutes nos équipes, du département légal à celui du marketing, en passant par les ventes, doivent être très impliquées. Et il faut savoir quel sera notre plan des 100 premiers jours. Car au-delà des 100 premiers jours, les gens seront moins réceptifs, et les changements se feront plus difficilement. »

L'aide aux producteurs

L'allocution du patron de Saputo se tenait moins d'une semaine après l'annonce par le gouvernement fédéral d'une aide de 2,15 milliards de dollars aux producteurs de lait, de volaille et d'oeufs pour compenser les pertes de revenus liées aux concessions faites quant à la gestion de l'offre dans les accords de libre-échange avec l'Europe et l'Asie-Pacifique. Saputo s'attendait-il à ce que les transformateurs récoltent aussi des dollars ? 

« Nous sommes très à l'aise avec cette décision, répond Lino Saputo Jr. S'il y a de l'argent à donner, ça devrait rester pour les producteurs. On n'a pas besoin d'argent. Comme j'ai dit à l'époque quand il y a eu des changements dans l'industrie, j'ai eu des conversations à l'interne et avec certains ministres. L'important pour nous, ce sont les licences d'importation. On veut avoir accès aux licences, car on veut rentrer des produits à valeur ajoutée. Par exemple, aux États-Unis, nous sommes le plus important transformateur et producteur de fromage bleu. Il y en a peu sur les tablettes au Canada. Pourquoi ne pas prendre notre fromage bleu des États-Unis, l'identifier comme un produit importé et le rentrer dans notre réseau de distribution et de ventes ? C'est le type de stratégie que nous allons entreprendre. »