Le grand patron de Saputo a bon espoir de voir les actionnaires de Murray Goulburn accepter son offre de 1,3 milliard la semaine prochaine même si les autorités réglementaires australiennes tardent à se faire entendre.

C'est le 4 avril que doit avoir lieu le vote sur cette transaction qui permettrait au géant québécois d'avaler cette coopérative, qui est le plus important producteur laitier de l'Australie. Toutefois, ce n'est que la veille que l'agence responsable de la concurrence et de la défense des consommateurs fera part de ses observations sur certains aspects de la transaction proposée.

Récemment revenu d'un séjour de deux semaines en Australie pour rencontrer différents intervenants, Lino Saputo fils a estimé mercredi que le choix de nombreux producteurs laitiers qui sont actionnaires de Murray Goulburn était fait.

«Je pense que les actionnaires sont d'accord à ce que Saputo mette la main sur les actifs, a expliqué le président et chef de la direction de l'entreprise québécoise, au cours d'un entretien téléphonique. Je pense qu'ils désirent que tout se passe rapidement.»

L'offre doit obtenir au moins 50,1% d'appuis pour aller de l'avant.

Dès les premières questions soulevées par les autorités réglementaires, Saputo a rapidement accepté de se départir d'une importante usine appartenant à Murray Goulburn, si elle met la main sur la coopérative, afin d'apaiser les craintes.

Située dans l'État de Victoria, l'usine de Koroit permettrait à la société québécoise de contrôler plus des deux tiers de la capacité de transformation dans cette région du pays, ce qui, selon l'agence australienne, pourrait paver la voie à une baisse des prix payés aux fermiers.

Cet engagement n'a toutefois pas empêché l'agence de repousser le moment où elle fera connaître son opinion, ce qui a surpris Irene Nattel, de RBC Marchés des capitaux.

«C'est surprenant, compte tenu que Saputo a passé beaucoup de temps à rencontrer des actionnaires depuis le 1er mars pour les assurer que l'entreprise allait tout respecter», a écrit l'analyste dans une note envoyée à ses clients.

Déjà présent aux États-Unis et en Argentine, Saputo avait mis le pied dans le marché australien en 2014 grâce à l'acquisition de Warrnambool Cheese & Butter (WCB).

Éprouvant des difficultés financières, Murray Goulburn, qui compte environ 2300 employés et 11 usines de fabrication en Australie ainsi qu'en Chine, misait sur l'offre de Saputo pour redresser son bilan.

Au cours du premier semestre de l'exercice 2018 terminé le 31 décembre dernier, la coopérative australienne avait généré un chiffre d'affaires d'environ 1,1 milliard CAN, en recul de 5% par rapport à la même période l'an dernier. Elle avait toutefois vu ses volumes de lait plonger d'environ 30%, à 1,1 milliard de litres. À cause de sa situation, Murray Goulburn avait réduit les prix offerts aux fermiers pour leur lait, ce qui avait incité plusieurs d'entre eux à regarder ailleurs.

M. Saputo, qui aurait préféré conserver l'usine de Koroit, estime néanmoins que l'acquisition de Murray Goulburn demeure intéressante pour la multinationale québécoise.

«Il y a plusieurs signaux dans le marché qui me laissent croire qu'il y a beaucoup d'intérêt à l'égard de ce site, a-t-il dit. Nous pensons que ce dossier sera particulièrement actif.»

Advenant que la transaction avec Murray Goulburn se confirme, l'homme d'affaires se dit bien conscient qu'il y aura un sérieux coup de barre à donner au sein de la coopérative australienne afin de relancer ses activités.

«Il faudra transformer plus de lait, a dit le patron de Saputo. La plupart des usines fonctionnent à entre 40% et 50% de leur capacité. Il faudra encourager d'autres agriculteurs à revenir dans le giron de Murray Goulburn.»

Selon lui, il faudra jusqu'à trois ans pour relancer Murray Goulburn afin que ses usines fonctionnent à plein régime.

En après-midi, à la Bourse de Toronto, le titre de Saputo se négociait à 40,01 $ en, hausse de 44 cents, ou 1,08%.