L'entreprise d'importation de vins Julia Wine part en guerre contre le monopole de la Société des alcools du Québec (SAQ) en offrant des vins haut de gamme dans 180 établissements Couche-Tard entre Trois-Rivières et Gaspé.

«Les gens ont une confiance aveugle en la SAQ, mais c'est seulement l'affichage des cépages qui tient le truc debout. C'est maintenant la fin de la prohibition», scande Alain Lord Mounir, président du conseil et chef de la direction chez Julia Wine, une entreprise québécoise qui importe, négocie et embouteille des vins provenant de petits lots de partout dans le monde.

La loi ne permet effectivement ni aux épiceries ni aux dépanneurs, d'afficher le cépage et l'appellation du vin sur l'étiquette. La réputation dont profite la SAQ confine les consommateurs à ses points de vente, explique M. Lord. Julia Wine a détourné cette réglementation «douteuse» en offrant l'information complète sur son site internet, croyant que les consommateurs souhaiteraient connaître ces détails.

L'entreprise mise sur la variété de ses produits, sur un meilleur accès à des vins de qualité SAQ, mais vendus «au coin de la rue», et surtout sur l'accès à l'information. «Il y a quelques années, nous avons failli perdre notre permis, car nous inscrivions la provenance du vin sur la bouteille.»

Les premiers arrivages sont déjà présents sur les étalages des Couche-Tard participants. Les consommateurs trouveront des bouteilles dont le prix variera de 13 à 70 $, et la société organise déjà le prochain arrivage, prévu pour les Fêtes, lorsque des bouteilles à 150 $ seront vendues.

Pourquoi avoir choisi Couche-Tard parmi tant d'autres? Pour son esprit entreprenant, mais surtout pour les trois millions de clients qui y passent chaque semaine. «Selon nous, un vin de consommation devrait se trouver à tous les coins de rue. Plus besoin de faire un détour par la SAQ, parfois de 20 km et plus pour les gens en région.»

Pas de surprise à la SAQ

À la SAQ, on ne se montrait pas surpris hier de la vente de vins haut de gamme dans les dépanneurs. «Nous étions au courant de la vente de vins et nous considérons ce réseau comme complémentaire à notre offre», affirme Renaud Dugas, responsable des relations de presse.

«D'ailleurs, depuis des années, la SAQ s'investit pour dynamiser, pour mousser les ventes de vins d'alimentation dans les épiceries», remarque M. Dugas. En effet, les consommateurs retrouvent un dérivé des pastilles de goût dans les épiceries.

Les consommateurs seront-ils au rendez-vous? Le président de Julia Wine le confirme et croit qu'il réussira à faire tomber le monopole de la société d'État avec la notoriété que sa marque s'est forgée depuis cinq ans dans les Costco, où elle était présente en exclusivité.

Julia Wine affirme offrir à ses clients des économies de l'ordre de 35 à 40 % sur la valeur réelle du vin, malgré la taxe de vente harmonisée de 9,975 % et la taxe de vente de 5 %. «Puisque nous sommes verticalement intégrés, nous évitons plusieurs échelons, dont les frais de représentation», explique le PDG.

«Est-ce qu'il y aura privatisation dans le monde du vin? Ce sont les consommateurs qui vont décider», tranche M. Lord.

L'Alberta a privatisé en 1993 la vente au détail des produits de l'alcool. Les consommateurs n'ont bénéficié d'aucun avantage, car la province prélève une taxe. Tout ce qui a baissé, c'est la marge de profit des détaillants.

Sans laisser entendre qu'un projet d'expansion à Montréal pourrait avoir lieu, Alain Lord stipule que son «objectif est de se concentrer sur l'est du Québec, étant donné qu'il y a moins de points de vente de vins».

Pas de passe-droit

Julia Wine n'a pas obtenu de passe-droit pour son importation de vin en vrac. En effet, tous les vins importés passent par un contrôle à la Société des alcools du Québec, qu'ils soient en vrac ou en bouteille. L'importateur doit payer une redevance à la société d'État de 45,3 % sur le prix initial du vin, ce qu'on appelle une majoration.