(New York) Les rendements des emprunts américains sont montés lundi à leur niveau le plus élevé depuis onze ans, un mouvement qui traduit l’agressivité de la politique monétaire de la banque centrale américaine (Fed), dont la réunion s’ouvre mardi, et pèse déjà sur l’économie réelle.

Les bons du Trésor américains à 10 ans ont atteint 3,51 %, une première depuis avril 2011.

Le taux à 2 ans, réputé plus sensible aux anticipations du marché quant à la politique monétaire de la Fed, est lui allé jusqu’à 3,96 %, un niveau plus fréquenté depuis près de 15 ans. Quant au rendement à un an, il a lui franchi 4 % pour la première fois depuis 21 ans.

« Les rendements sont à leurs plus hauts depuis des années, mais les taux de la Fed sont aussi à des sommets de plusieurs années, parce que l’inflation est elle-même à des records de 40 ans », souligne John Canavan, d’Oxford Economics.

Depuis le discours du président de la Fed Jerome Powell, à Jackson Hole (Wyoming), fin août, les investisseurs s’attendent à un tour de vis monétaire plus rapide et prolongé que prévu initialement.

Les opérateurs privilégient désormais l’hypothèse d’un taux de la Fed à au moins 4,50 % en fin d’année, contre 3,75 % il y a un mois, une altitude que l’institution n’a plus connue depuis près de 15 ans.

« Je ne pense pas que le marché s’emballe », estime John Canavan. « C’est un processus naturel de réévaluation de la politique monétaire de la Fed. »

Ce coup de chaud du marché obligataire pèse déjà sur les conditions de financement des entreprises.

Le taux moyen pour un crédit à 10 ans pour les sociétés américaines les mieux notées a bondi de quasiment un point depuis début août.

Pour les entreprises les moins bien notées, le coût moyen du crédit frôle désormais les 9 %, contre environ 4 % il y a un an seulement.

Le marché immobilier est aussi en première ligne, avec un taux moyen pour les crédits hypothécaires à 30 ans qui est passé, la semaine dernière, au-dessus de 6 % pour la première fois depuis 2008.

« Nous pensons que nous sommes proches du sommet », avance Lawrence Gillum, de LPL Financial. « Il est possible qu’on aille jusqu’à 3,75 % pour le taux à 10 ans, mais compte tenu de la recherche de rendement et du fait qu’on va probablement vivre une récession dans les douze mois, on pourrait voir les taux reculer. »

Pour lui, la remontée des taux a rendu les obligations plus attractives et, dans le contexte de marchés actions qui ne cessent de se replier, beaucoup d’investisseurs pourraient revenir vers ce placement dans les mois à venir.

Le prix des obligations évoluant en sens opposé de leur taux, un regain d’appétit pour ces produits ferait mécaniquement baisser leur rendement.