La Voie maritime du Saint-Laurent a officiellement ouvert, jeudi, sa 64e saison de navigation avec la perspective d’une demande accrue de céréales et d’engrais canadiens découlant de la guerre en Ukraine.

Les sanctions contre la Russie et la dévastation en Ukraine pourraient perturber considérablement l’approvisionnement mondial en céréales et en engrais, en particulier vers l’Europe.

Selon le président et chef de la direction de la Corporation de gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent, Terence Bowles, les exportations canadiennes pourraient être appelées à combler ces pénuries.

« Je n’aime pas dire que cela va nous aider parce que ça donne l’impression que nous profitons des problèmes des autres », a-t-il affirmé lors d’une entrevue.

« Mais je dirais que le Canada est en bonne position pour pouvoir aider à remplacer une grande partie des céréales qui ne seront pas disponibles. »

La Russie et l’Ukraine représentent 29 % des exportations mondiales de blé et la Russie est le premier exportateur mondial d’engrais. Mais l’Ukraine devrait perdre cinq millions de tonnes d’exportations de blé d’ici septembre, puisque les agriculteurs sont moins en mesure d’ensemencer dans le contexte des bombardements russes et des millions de personnes qui fuient le pays.

La capacité du Canada à réagir aux perturbations dépendra de la vigueur de la prochaine récolte céréalière de l’Ouest canadien et du Midwest américain. La production de l’an dernier avait été dévastée par la plus importante sécheresse en 60 ans, a rappelé M. Bowles.

« Nous devons donc tous espérer et prier pour obtenir une très bonne récolte de céréales dans l’Ouest, car je suppose que nous en aurons besoin. »

Agriculture et Agroalimentaire Canada s’attend à ce que la production et les exportations globales de blé s’établissent à des creux record pour la campagne agricole qui se terminera le 31 juillet. Elles devraient être légèrement meilleures en 2022-2023, puisque les hausses de prix incitent les agriculteurs à ensemencer de plus grandes superficies.

« En supposant le retour à des rendements normaux ou légèrement inférieurs à la normale dans les grandes cultures, l’ensemble des productions et des offres devraient revenir à des niveaux plus normaux, ce qui permettra aux stocks de fin de campagne d’augmenter, mais ils demeureront encore relativement serrés, car on s’attend à une remontée des exportations et des utilisations intérieures comparativement à la campagne agricole précédente », a écrit l’agence dans son rapport de mars sur les perspectives des principales grandes cultures.

Mais M. Bowles estime que la Voie maritime sera prête à répondre à la demande si les récoltes de céréales en Ontario, dans l’Ouest et aux États-Unis devaient être plus fortes que prévu. Il sera également possible d’expédier du maïs et du soja depuis l’Ontario et les États-Unis, tandis que la potasse de la Saskatchewan pourrait être exportée en raison d’un changement dans les habitudes d’achat attribuable à l’exclusion de l’approvisionnement de la Russie et de la Biélorussie.

Expéditions globales stables cette année

La semaine dernière, Nutrien, établie en Saskatchewan, a indiqué qu’elle augmenterait sa production de potasse d’environ 20 % en réponse à l’incertitude de l’approvisionnement en provenance d’Europe de l’Est, alors que l’invasion russe en Ukraine se poursuit.

Certaines des exportations de céréales qui sont allées vers la Chine par le passé pourraient également se déplacer vers l’Est cette année pour rejoindre l’Europe, incluant l’Ukraine, a ajouté M. Bowles.

Pendant ce temps, les sanctions contre la Russie auront peu d’impact sur les importations au Canada. La Voie maritime n’a traité que 424 000 tonnes d’importations d’acier, de brames et d’engrais en provenance du pays l’année dernière.

La Voie maritime prévoit que les expéditions globales de fret resteront stables à environ 38,2 millions de tonnes cette année, après avoir augmenté de seulement 1,1 % en 2021, ou de près de 13 % en excluant les céréales.

Les expéditions de fret devraient augmenter conformément à la croissance économique prévue de 4,0 %, en excluant les céréales.

En outre, la Voie maritime a été ouverte jeudi et le vraquier de la Classe Trillium CSL Welland a été le premier navire de la saison à franchir le canal Welland à St Catharines, en Ontario.

Le ministre fédéral des Transports, Omar Alghabra, devait assister virtuellement à l’évènement.

M. Alghabra a affirmé que la priorité absolue du gouvernement était de maintenir les chaînes d’approvisionnement en mouvement, notant que la voie maritime soutenait 92 000 emplois et transportait pour 17 milliards de commerce chaque année.

« Alors que la reprise s’amorce après la pandémie, nous nous engageons à contribuer au dynamisme de notre économie et à maintenir nos investissements dans les projets destinés à ce corridor essentiel au transport des marchandises », a-t-il déclaré dans un communiqué.