Les décideurs régionaux demeurent résolument optimistes pour la suite des choses en dépit des nombreux projets industriels annoncés qui n’ont jamais vu le jour au Parc industriel de Bécancour au fil de son histoire de presque 60 ans.

« Cette fois-ci, nous avons espoir que c’est la bonne », indique au téléphone Lucie Allard, mairesse de Bécancour, élue en novembre dernier.

Après Nouveau Monde Graphite et Nemaska Lithium, l’allemande BASF, vendredi, et GM, lundi, ont annoncé tour à tour des investissements d’un demi-milliard de dollars dans la fabrication de composantes de batterie de véhicules électriques.

« C’est une manne extraordinaire et inespérée qui est en ligne avec une future zone d’innovation en transition énergétique dont l’un des thèmes sera l’électrification des transports et le monde des batteries », dit Mario De Tilly, directeur général d’Innovation et Développement économique (IDE) Trois-Rivières.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Mario De Tilly, directeur général d’Innovation et Développement économique Trois-Rivières

Pôle régional d’envergure, Trois-Rivières est située en Mauricie tandis que la ville de Bécancour, qui lui fait face sur la rive sud du Saint-Laurent, est rattachée administrativement à la région Centre-du-Québec, tout en étant incluse dans la région métropolitaine de Trois-Rivières.

Maurice Richard, ancien député provincial et ancien maire de Bécancour, dirige le parc industriel appartenant au gouvernement provincial depuis 2012. Il a connu, par exemple, le défunt projet d’une usine d’engrais à base d’urée pilotée par une coopérative indienne et La Coop fédérée, devenue Sollio, qui devait voir le jour à Bécancour. Lui aussi croit que la filière batteries a changé les perspectives sur la Rive-Sud.

« Les Allemands ont décidé de s’en venir ici. Les joueurs de la Corée du Sud viennent ici avec les Américains. Les endormis se réveillent, dit-il. Ils se disent qu’il se passe quelque chose au Québec. »

On a des avantages [au Québec]. On a de l’électricité – c’est énergivore, ces entreprises-là – et elles ont besoin de plein d’éléments. Puis, tout à coup, ils réalisent que tous ces éléments-là se trouvent au Québec.

Maurice Richard, PDG de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour

Bécancour offre en effet toute une palette d’avantages : port en eau profonde ouvert à l’année, chemin de fer, présence sur place de fabricants d’intrants comme de la silice et, prochainement, de concentré de lithium. Le parc a aussi l’immense avantage d’avoir du terrain disponible.

GM et son partenaire sud-coréen Posco ont réservé un terrain de 1,3 million de mètres carrés (ou 14 millions de pieds carrés) dans la partie située au sud de l’autoroute 30. Pour BASF, ce sont 1,5 million de mètres carrés (16 millions de pieds carrés). Nemaska Lithium, qui va devenir le voisin de GM, va occuper près de 500 000 mètres carrés (5,4 millions de pieds carrés).

Pour les Montréalais, 1,5 million de mètres carrés, c’est 5 fois la superficie du Parc olympique, en incluant l’esplanade en béton.

« Tous les terrains de la partie sud sont à peu près réservés ou prévus pour la batterie », précise le député provincial de Bécancour, Donald Martel, présent à la conférence de presse qui s’est tenue au concessionnaire GM Le Relais de l’avenue Papineau, à Montréal.

La société du parc industriel doit maintenant prendre les bouchées doubles pour raccorder le nouveau secteur aux services municipaux et ouvrir des rues. Les premiers appels d’offres seront lancés prochainement, annonce M. Richard. Des travaux d’infrastructures de 300 millions sont prévus d’ici l’ouverture de l’usine de GM en 2025. Le gouvernement québécois a débloqué 38 millions à cette fin.

Pôle des technologies vertes en Mauricie

« [Les annonces de BASF et GM], c’est la réalisation auprès du gouvernement provincial que la Mauricie est un des pôles de technologies vertes du Québec », soutient, pour sa part, le professeur Frédéric Laurin à l’École de gestion de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), en faisant référence à la grappe de 30 PME innovantes et 5 centres de recherche dans le domaine. La future zone d’innovation viendra fédérer tous ces acteurs, prévoit-il.

La Mauricie revient de loin. En 2013, elle se classait au dernier rang des régions du Québec pour son dynamisme économique et détenait le titre peu glorieux de championne du chômage. Moins de dix ans plus tard, souligne le professeur Laurin, le taux de chômage a fondu sous les 5 %, et la région a grimpé de 4 échelons au classement de l’indicateur composite de performance économique, formé de 21 variables comme le produit intérieur brut par habitant, la pauvreté, la création de nouvelles entreprises, etc.

« C’est historique, ce qui se passe à Trois-Rivières », lance pour sa part M. De Tilly.

Trois-Rivières a déjà été le haut lieu de l’industrialisation du Québec. Puis, il y a eu une déconfiture incroyable. Et maintenant, on vit un rebond intense.

Mario De Tilly, directeur général d’Innovation et Développement économique Trois-Rivières

Depuis deux ans, la croissance est robuste dans la construction, l’accroissement démographique et la création d’emplois.

« Tous les indicateurs sont au vert foncé », insiste M. De Tilly.