Les longues files d’attente pour entrer dans les épiceries et les magasins à grande surface ont été l’un des phénomènes marquants du début de la crise de COVID-19.

Depuis, un autre type de file d’attente a vu le jour — et ce n’est pas pour faire des réserves de papier toilette.

Des automobilistes qui se suivent à la queue leu leu pour se procurer des beignets ou encore de la crème glacée au service à l’auto ont récemment entravé la circulation à divers endroits au Canada.

À Edmonton, en Alberta, Rob Ladouceur et son épouse ont tenté leur chance, sans succès, pendant trois jours consécutifs dans une nouvelle succursale de la chaîne de restauration rapide Peters’Drive-In.

Pris d’une envie de hamburgers, de frites et de frappés au lait, le couple est reparti bredouille une première fois, lorsque la file de voitures s’étirait sur près d’un kilomètre. Ils ont été refoulés à deux autres fois parce que le restaurant a dû fermer ses portes pour la journée avant que leur voiture n’atteigne la fenêtre du service au volant.

La nouveauté de la succursale a contribué à son attrait, mais M. Ladouceur estime que la pandémie y est aussi pour quelque chose. Les clients n’étant pas autorisés à entrer dans le restaurant, le service au volant était leur seule option. M. Ladouceur explique qu’il cherchait pour sa part une occasion divertissante de sortir de la maison. « C’est important que les gens continuent de suivre les directives sur la distanciation physique et sociale, mais en même temps, je comprends la psychologie derrière le fait de vouloir se sentir un peu comme à la normale. Je pense que c’était l’objectif pour nous », dit-il.

À Winnipeg, au Manitoba, le bar-glacier Bridge Drive-In a fermé son service au volant deux jours après son ouverture, en raison des bouchons de circulation qui créaient des frictions avec le voisinage.

En Ontario, des clients ont attendu jusqu’à deux heures pour une boîte de beignes à Mississauga et le jardinage, considéré comme une activité de plein air sans risque, a inspiré une ruée vers une nouvelle serre, à Barrie.

Selon James Danckert, professeur de psychologie à l’Université de Waterloo et spécialiste de l’ennui, ces longues files d’attente pour des produits pourtant non essentiels peuvent naître d’un désir de renouer avec son quotidien prépandémie.

Même si l’attente est pénible, les gens sont prêts à patienter pour le sentiment de liberté que ça leur procure après huit semaines de confinement, explique M. Danckert. « Avant tout ça, nos routines quotidiennes avaient au moins une certaine variété », souligne-t-il.

Une application web participative a d’ailleurs vu le jour pour indiquer la durée d’attente dans divers commerces.

Mark Kolb, d’Aurora, en Ontario, a créé Linesups.live après avoir vu une longue file devant un Costco, à 7 h du matin en avril. L’application dépend de la contribution des utilisateurs qui saisissent en temps réel la longueur d’une file ou la durée d’attente.

« C’est devenu viral à Toronto, puis à travers le Canada, indique M. Kolb. Si les files d’attente sont là pour de bon, je vais l’améliorer. »

Précision :
Dans une dépêche transmise le 15 mai sur les fils d’attente, La Presse canadienne écrivait erronément que le nom du créateur de Linesups.live s’appelait Mike Kolb. Dans les faits, il se nomme Mark Kolb.