(Genève) Le commerce international devrait enregistrer une contraction historique en 2020 en raison de la pandémie de COVID-19 sur une planète confinée, où les entraves à l’activité économique et aux échanges aggravent un contexte déjà néfaste de tensions et d’incertitudes, a prévenu mercredi l’OMC.

Les échanges commerciaux pourraient s’effondrer de 13 % à 32 % en volume cette année dans le pire des scénarios, après s’être accrus de 2,9 % en 2018 et avoir reculé de 0,1 % en 2019, selon les calculs des économistes de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dont le siège est à Genève.

« Des millions de personnes dans le monde ont déjà perdu leur emploi et leurs revenus », s’est alarmé son directeur général, Roberto Azevedo, lors d’une conférence de presse virtuelle.

La pandémie, qui a déjà contaminé 1,4 million de personnes dans le monde, dont plus de 80 000 sont décédées, pourrait provoquer « la plus grave récession ou le plus sérieux revers économique de notre existence », a-t-il ajouté.

Déjà minés par les tensions commerciales et les turbulences liées au Brexit, les échanges commerciaux devraient accuser une baisse à « deux chiffres » dans « presque toutes les régions » de la planète, indique l’organisation dans ses prévisions annuelles publiées mercredi.

La correction menace d’être particulièrement sévère pour l’Amérique du Nord et l’Asie, dont les exportations pourraient s’effondrer de plus de 40 % et 36 % respectivement, en retenant l’hypothèse la plus pessimiste.

L’Europe et l’Amérique du Sud enregistreraient des baisses également supérieures à 30 %.

« Les gouvernements dans le monde entier peuvent et doivent poser les fondations d’un redressement énergique et inclusif […] Si les pays œuvrent ensemble, nous verrons un redressement plus rapide et plus solide que si chaque pays agit seul », a prévenu Roberto Azevedo.

Au total, la crise des échanges mondiaux sera « probablement supérieure à la contraction du commerce causée par la crise financière mondiale de 2008-2009 », prévient l’OMC.

« Des secteurs entiers des économies nationales ont été fermés, comme l’hôtellerie, la restauration, le commerce de détail non essentiel, le tourisme et une part importante de l’activité manufacturière », ajoute-t-elle.

Une relance est possible

Les deux superpuissances de la planète, la Chine, berceau de la pandémie, et les États-Unis, son nouvel épicentre, injectent et vont injecter des centaines, voire des milliers, de milliards de dollars et de yuans dans leurs économies pour limiter l’ampleur de la dépression.

Les principaux moteurs de l’économie européenne sont également sinistrés : en Allemagne, l’économie pourrait se contracter de près de 10 % au deuxième trimestre, du jamais vu dans l’histoire récente, tandis que la France devrait connaître une récession inédite après la chute du PIB d’environ 6 % au premier trimestre, soit sa pire performance trimestrielle depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

« La baisse inévitable du commerce et de la production aura des conséquences douloureuses pour les ménages et les entreprises, en plus des souffrances humaines causées par la maladie elle‑même », a prévenu Roberto Azevedo.

Pas moins de 1,25 milliard de travailleurs risquent notamment d’être directement affectés par la crise alors que plus de 4 milliards de personnes, soit plus de la moitié de l’humanité, sont contraintes ou incitées à rester chez elles, selon l’Organisation internationale du travail (OIT).

« Les chiffres sont mauvais, c’est indéniable. Mais une relance rapide et vigoureuse est possible. Les décisions prises aujourd’hui détermineront la forme de la reprise et les perspectives de croissance mondiale. Nous devons poser les fondements d’une reprise forte, soutenue et socialement inclusive », a relevé Roberto Azevedo.

Les divers scénarios de l’OMC anticipent un rebond du volume du commerce mondial de plus de 21 % en 2021 à 24 %, et jusqu’à 36 % en Asie.

Ces estimations sont entourées d’un grand degré d’incertitude, reconnaît l’OMC, en fonction de la durée de la pandémie et des mesures mises en place pour la combattre.

« La probabilité d’une reprise forte est plus grande si les entreprises et les consommateurs considèrent la pandémie comme un choc temporaire et ponctuel », note l’OMC.