Bien que ralentie par rapport au rebond surprenant du trimestre précédent, la croissance de l’économie canadienne au troisième trimestre, à 1,3 % en termes annualisés, s’est avérée un peu meilleure que prévu par les économistes du secteur bancaire.

À leur avis, cette « meilleure résilience » que prévu est de bon augure pour le quatrième trimestre de 2019 et le début de l’an prochain, en dépit des nuages persistants dans la conjoncture économique mondiale.

« Le rapport sur le PIB [au troisième trimestre] est indéniablement meilleur qu’on le prévoyait, alors qu’un ralentissement de la croissance était à prévoir après les gains du trimestre précédent qui ne pouvaient pas continuer éternellement », indique Krishen Rangasamy, économiste principal à la Banque Nationale, dans une note de conjoncture distribuée vendredi.

« Le commerce extérieur a été un boulet pour la croissance, comme on s’y attendait, en raison de la diminution des exportations. En revanche, la demande intérieure a été forte, soutenue par toutes les grandes composantes, c’est-à-dire la consommation, les administrations publiques, l’investissement résidentiel et même l’investissement des entreprises. »

Par conséquent, selon Krishen Rangasamy, « c’est un point de départ plus robuste que prévu [pour le quatrième trimestre] qui nous incite à revoir à la hausse notre prévision de croissance du PIB canadien pour l’année 2019 d’un dixième de point, à 1,7 %. Et les perspectives pour 2020 semblent prometteuses ».

Entre autres, note-t-il, « d’importantes révisions à la hausse du taux d’épargne des ménages à un sommet inégalé en quatre ans sont de bon augure pour la consommation future. Aussi, la ponction dans les stocks [des entreprises] au cours des deux derniers trimestres donne à penser que la croissance pourrait aussi être dopée par la reconstitution des stocks au début de 2020 ».

« Résultats encourageants »

Au Mouvement Desjardins, l’économiste principal, Benoit P. Durocher, fait état de « résultats encourageants » pour le PIB canadien au troisième trimestre.

Malgré une progression plus faible que lors des trimestres précédents, les résultats du PIB au troisième trimestre sont assez encourageants, d’autant que la hausse de la demande intérieure dépasse largement les prévisions.

Benoit P. Durocher, économiste principal au Mouvement Desjardins

Cependant, pour la fin d’année 2019, l’économiste de Desjardins estime qu’il « faut s’attendre à ce que la progression du PIB conserve un rythme modéré au quatrième trimestre, alors que l’acquis de croissance n’est que d’environ 0,6 %, ce qui est relativement faible ».

Quels facteurs à suivre ? « En outre, on peut se demander si les investissements non résidentiels des entreprises seront en mesure de poursuivre leur ascension. De plus, les données préliminaires en provenance du commerce extérieur laissent croire que les difficultés des exportations ont continué à l’automne », avertit Benoit P. Durocher.

Certaines « fissures » apparaissent

À la Banque Laurentienne, l’économiste en chef Sébastien Lavoie constate que « l’économie canadienne montre des signes encourageants de résilience ».

Et ce, en dépit de « certaines fissures qui se sont ouvertes » telles que la faiblesse des exportations, qui a encore freiné la croissance du PIB comme lors de trois des six derniers trimestres ».

N’empêche, Sébastien Lavoie apprécie dans ces nouveaux chiffres que « les entreprises canadiennes aient augmenté leurs investissements en machinerie et équipements, en bâtiments non résidentiels et en produits de propriété intellectuelle ».

Aussi, souligne-t-il, « les investissements résidentiels – une mesure-clé du secteur du logement – ont progressé durant le troisième trimestre à un rythme sans précédent depuis 2012 ».

Par conséquent, estime l’économiste, « les étoiles s’alignent pour renforcer davantage le marché de l’habitation au Canada en raison de la baisse des taux hypothécaires, de la création d’environ 300 000 emplois à temps plein jusqu’à présent cette année et de l’un des taux de formation de ménages les plus élevés parmi les pays industrialisés ».

Et la Banque du Canada ?

Cela dit, ces chiffres auront-ils un impact sur la Banque du Canada lors de sa prochaine décision de taux d’intérêt, attendue mercredi prochain, le 4 décembre ?

« Tout bien considéré, les résultats du PIB publiés vendredi confortent ma conviction que la Banque du Canada n’a pas besoin d’injecter de mesures de stimulation additionnelles [NDLR : baisse de taux] dans l’économie canadienne », répond Krishen Rangasamy, économiste principal à la Banque Nationale.

« Les détails du rapport sur le PIB au troisième trimestre, généralement encourageants, renforcent mon opinion selon laquelle il est peu probable que la Banque du Canada réduise son taux directeur la semaine prochaine ou au cours de l’hiver 2020 », soutient pour sa part Sébastien Lavoie.

Quant à Benoit P. Durocher, il estime « qu’avec le regain de vitalité de la demande intérieure, il devient de plus en plus difficile de justifier la nécessité d’une réduction des taux d’intérêt directeurs au Canada, même si les incertitudes restent élevées ».

Par conséquent, dit-il, « notre scénario table toujours sur un prolongement du statu quo de la Banque du Canada au cours des prochains trimestres ».