La mort annoncée du mazout à Montréal, qui n’a pas fait de distinction pour la biénergie, accroîtra la demande d’électricité en période de pointe – un souci constant pour Hydro-Québec.

Si les règlements municipaux forcent l’ensemble des 23 000 clients montréalais abonnés à la biénergie au mazout à abandonner ce combustible, une pression supplémentaire de 110 mégawatts (MW) s’exercera sur la société d’État.

La disparition du mazout pour l’ensemble du chauffage résidentiel à Montréal nécessiterait une puissance électrique supplémentaire de 230 MW.

Le système de chauffage biénergie combine l’électricité comme source principale et un combustible — mazout, gaz naturel, propane, granules de bois — qui prend le relais lorsque le mercure descend au-dessous de - 12 ou — 15 °C, selon les régions.

Efficace en période de pointe

Le tarif DT qui s’y applique comporte deux volets, soit un prix réduit en temps normal, et un prix plus élevé que le tarif D courant quand le système d’appoint entre en fonction.

En transférant aux combustibles la production de chaleur durant les grands froids, Hydro-Québec réduit la demande en période de pointe.

Cette réduction « permet d’éviter actuellement des achats de puissance de l’ordre de 500 MW », affirme le porte-parole Cendrix Bouchard. 

« Cette contribution [de la biénergie] est grandement utile durant la période où la demande d’électricité est à son maximum. » — Cendrix Bouchard, porte-parole

En raison de son importance en période de pointe, Hydro-Québec continue à soutenir son programme de biénergie. Pour contrer les effets de la hausse du prix des produits pétroliers, la société a abaissé son tarif DT en 2017 et en 2018 et l’a gelé en 2019, alors que ses autres tarifs augmentaient.

Malgré tout, Hydro-Québec prévoit que le tiers des 100 000 clients biénergie au Québec se convertiront au chauffage entièrement électrique d’ici 2030. À terme, la demande de puissance s’accroîtrait alors d’environ 170 MW.

« Si ce changement survenait de façon graduelle, par exemple au cours des 10 prochaines années, cela permettrait d’avoir le temps d’établir une stratégie pour approvisionner ce nouveau besoin pour ce qui est des périodes de pointe hivernales », soutient Cendrix Bouchard.

Pour y faire face, Hydro-Québec Distribution compte sur son portefeuille de contrats d’approvisionnement ainsi que sur le volume d’électricité patrimoniale. Elle poursuit aussi ses mesures d’encouragement à l’économie d’énergie.

Par ailleurs, deux nouvelles offres de tarification dynamique, offertes à compter de l’hiver 2019-2020, devraient également contribuer à réduire la demande d’électricité en période de pointe.

Du mazout renouvelable ?

Entre-temps, le nombre de ménages qui chauffent uniquement au mazout baisse comme le contenu d’un réservoir en janvier.

« Nos prévisions à long terme prenaient déjà en compte [le fait] que la très grande majorité se convertira à l’électricité d’ici 2030 », dit Cendrix Bouchard.

88 000 : Nombre de foyers québécois qui chauffent uniquement au mazout, selon Hydro-Québec. Leur consommation équivaut à une demande de 440 MW.

En réponse à cette attrition accélérée, les distributeurs de produits pétroliers cherchent fébrilement des solutions de remplacement.

« Mes membres regardent d’autres produits », fait valoir Sonia Marcotte, présidente-directrice générale de l’Association des distributeurs d’énergie du Québec. « Des combustibles renouvelables s’en viennent, qui peuvent être faits à partir de biomasse, de copeaux de bois. Avec ça, on peut faire du diesel renouvelable qui pourra être utilisé dans les équipements de chauffage. »

Les distributeurs d’énergie entendent ainsi fournir l’argument de la dernière chance en faveur de la biénergie.

« On veut être prêts bien avant 2030. »