Un fonds d'investisseurs activistes américain, Starboard Value, a décidé jeudi de passer à l'offensive contre Yahoo!, réclamant le changement complet de son conseil d'administration y compris la dirigeante Marissa Mayer actuellement en position délicate.

Starboard, qui détient 1,7% du capital, indique dans une lettre qu'il va proposer la nomination de neuf personnes de son choix au sein du conseil d'administration lors de l'assemblée annuelle car il doute que l'équipe actuelle puisse entreprendre les changements nécessaires pour relancer le groupe.

Mme Mayer et David Filo, un des cofondateurs de Yahoo!, font partie de cette instance qui valide les orientations stratégiques, ce qui augure d'une guerre des résolutions à l'issue incertaine.

Les activistes sont des investisseurs qui veulent des retours sur investissements rapides en exigeant des directions des entreprises dans lesquelles ils investissent des économies, des cessions d'actifs et des programmes de rachats d'actions. En cas de rejet, ils ont coutume d'engager des bras de fer très médiatisés qu'ils finissent souvent par remporter.

AOL, sous la pression de Starboard, s'est par exemple résolu à se vendre à Verizon l'an dernier, tandis que l'influent activiste américain Nelson Peltz a obtenu la tête de la PDG du fleuron industriel DuPont après un conflit à rebondissements.

Ironie de l'histoire, Mme Mayer elle-même avait pris les rênes de Yahoo! en 2012 à la suite d'un «putsch» du fonds Third Point qui appartient à l'investisseur activiste Dan Loeb.

«Au vu de la situation, je pense que la scission de Yahoo! est imminente ainsi que le départ de Marissa Mayer», estime Roger Kay, analyste chez EndPoint.

Pressions

«L'équipe dirigeante de Yahoo! a de façon répétée déçu les actionnaires», fustige Starboard, qui pousse depuis 18 mois à une restructuration massive du groupe.

Le fonds se dit «persuadé que le conseil d'administration (actuel) manque clairement de direction, d'objectivité et de la vision nécessaire pour prendre des décisions qui sont dans l'intérêt des actionnaires». Jeffrey Smith, directeur général de Starboard, fait partie des neuf noms qui seront soumis au vote des actionnaires.

Le conseil «va examiner les candidats proposés par Starboard et répondra le moment venu», a réagi Yahoo!, qui a enregistré une perte de 4,4 milliards de dollars en 2015 et fait face à un exode de talents.

Starboard a obtenu récemment que Yahoo! élargisse à neuf contre sept auparavant le nombre de membres de son conseil et surtout qu'il change ses projets de cession de sa participation de 15% dans le géant du commerce en ligne chinois Alibaba.

Cette nouvelle attaque fragilise un peu plus Mme Mayer, arrivée aux manettes en 2012 pour relancer l'ex-fleuron de l'internet. Mais après plus de trois ans et de multiples initiatives, Yahoo! est toujours à la traîne et n'arrive pas à se réinventer.

Mme Mayer a annoncé en février un nouveau plan de restructuration, considéré comme celui de la dernière chance.

Il comprend une réduction de 15% des effectifs et une rationalisation de ses activités dont la fermeture de ses bureaux à Dubaï, Mexico, Buenos Aires, Madrid et Milan entre autres. L'objectif est d'économiser plus de 400 millions de dollars.

Yahoo! a en outre mis en place un comité indépendant pour l'aider à trouver les recettes miracles.

Toutes les options sont sur la table dont une vente pure et simple ou la cession de son coeur de métier, à savoir le portail internet lui-même, pour lequel l'opérateur télécoms Verizon et les fonds KKR et TPG ont déjà manifesté l'intérêt.

Mme Mayer parie sur le mobile et la vidéo en ligne mais les recettes publicitaires de ce relais de croissance devraient plonger de près de 14% à 2,83 milliards de dollars en 2016, face à la concurrence de Google, calcule le cabinet eMarketer.

Outre Starboard, les fonds Canyon et SpringOwl ont aussi affiché récemment leur mécontentement vis-à-vis de la gestion de Yahoo! et sont allés jusqu'à demander le départ de Mme Mayer à qui ils reprochent des dépenses jugées trop coûteuses comme la nourriture gratuite pour les salariés, des fêtes, des opérations de commandite et des milliards de dollars d'acquisitions.