Sous la pression, le PDG-fondateur de Dell a relevé symboliquement son offre contestée pour racheter le groupe informatique américain, mais il réclame surtout un mode de consultation des autres actionnaires qui lui serait plus favorable.

Dans une lettre datée de mardi soir et rendue publique mercredi par le comité spécial créé au sein du conseil d'administration pour piloter l'opération, Michael Dell et son associé, le fonds Silver Lake, ont annoncé ce qu'ils présentent comme leur «meilleure et dernière proposition».

Ils se disent prêts à augmenter de 10 cents à 13,75 dollars par action leur offre de rachat intégral du groupe. C'est une rallonge de seulement 150 millions de dollars par rapport au projet de 24,4 milliards annoncé début février.

Michael Dell tente depuis de convaincre qu'une fois à l'abri des regards de la Bourse, il lui sera plus facile de recentrer le groupe sur d'autres activités que les PC. Dell en est toujours le numéro trois mondial, mais ce marché est en plein marasme.

Son prix était jugé insuffisant par plusieurs actionnaires. L'investisseur Carl Icahn, connu pour ses opérations boursières hostiles et deuxième actionnaire de Dell derrière le PDG, leur a donné des raisons supplémentaires de rechigner: il fait campagne pour que le groupe s'endette et puise dans ses liquidités afin de financer un programme de rachat d'actions à 14 dollars par titre.

L'annonce de la nouvelle offre s'est traduite par un nouveau report de l'assemblée générale extraordinaire qui était censée trancher sur le projet de rachat du PDG. Déjà ajournée jeudi dernier, elle a été reportée une nouvelle fois, de ce mercredi au 2 août à 10 h.

Changement de règles «outrageant»

Les 15,6% du capital entre les mains de Michael Dell ou de proches à la date du 22 mai ne peuvent pas participer au scrutin.

Face à lui, Carl Icahn et son allié, le fonds Southeastern Asset Management, pèsent 13% à eux deux. Et ils ont jusqu'ici un gros avantage: les votes blancs ou les absents doivent être comptabilisés comme des «non».

L'abandon de cette dernière modalité est une condition sine qua non de l'offre améliorée: Michael Dell exige que seulement le capital présent ou représenté soit pris en compte pour calculer le résultat du vote, et pas l'ensemble du capital du groupe comme ce qui était prévu jusqu'ici.

Dans un communiqué séparé, il précise que selon les dernières estimations, 27% des actions ayant un droit de vote ne comptent pas l'utiliser.

Michael Dell laisse désormais jusqu'au matin de l'assemblée générale au comité spécial, qui selon certains médias réclamait un relèvement beaucoup plus conséquent de l'offre à 14 dollars, pour décider de soutenir ou non sa proposition.

Pour la maison de courtage Topeka, «la saga du rachat de Dell a atteint de nouveaux niveaux d'absurdité». Et changer maintenant le mode de calcul des votes «va faire paraître le conseil d'administration au mieux mou et tiède, et au pire à la botte de Michael Dell», prévient le site d'analyse 247wallst.com.

«Changer les règles à la dernière minute est outrageant», ont dénoncé pour leur part Carl Icahn et Southeastern dans une lettre ouverte aux actionnaires de Dell.

«Michael Dell et Silver Lake ont franchi le Rubicon en essayant de retirer la seule clause (...) qui donnait aux actionnaires une voix dans l'entreprise», accusent-ils.

«Il y a quelques jours, nous avertissions le conseil d'administration de ne pas gérer l'entreprise comme une république bananière. Certains commentateurs ont même comparé cette débâcle désespérée de Dell à Vladimir Poutine ou la Corée du Nord», poursuivent-ils, concluant: «il est temps pour Michael Dell et ce conseil d'administration de partir».

Carl Icahn a beau dire qu'il a déjà un remplaçant en tête pour Michael Dell, la seule question posée pour l'instant aux actionnaires concerne le retrait de la Bourse. Même s'il remporte cette première victoire, l'investisseur ne peut pas garantir l'application de son projet: il faudra encore faire tomber le conseil d'administration lors d'une assemblée générale ultérieure, où cette fois le PDG pourra voter.

Après une séance en dent de scie, l'action Dell a finalement clôturé mercredi sur un gain de 0,27% à 12,92 dollars.