Les fournisseurs de services télévisuels lancent déjà des services sur demande afin de concurrencer Netflix, a affirmé Rogers Communications (T.RCI.B) à Montréal, mercredi, s'opposant à l'affirmation de Bell voulant que son acquisition d'Astral Media contribuerait à fournir aux Canadiens une alternative aux entreprises en ligne étrangères.

Contrairement à Netflix, Apple TV et Google TV n'ont pas vraiment réussi à séduire les téléspectateurs, a indiqué Rogers lors des audiences du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) sur l'entente de 3,4 milliards $ conclue par Bell afin d'acquérir Astral, dont le siège se trouve à Montréal.

«L'idée voulant que Bell plus Astral soit ce dont nous avons besoin pour vaincre Netflix au Canada en est une que nous trouvons absurde», a déclaré le vice-président principal aux affaires réglementaires chez Rogers, Ken Engelhart.

Plus tôt cette semaine, Bell a affirmé au CRTC vouloir lancer un concurrent canadien à Netlix et aux autres grands fournisseurs en ligne américains, dans l'espoir de convaincre l'organisme du bien-fondé de son acquisition d'Astral.

Néanmoins, M. Engelhart a indiqué que les câblodistributeurs du Canada et d'ailleurs en Amérique du Nord mettaient déjà la main sur les droits d'émissions de télévision et de films afin de faire concurrence à Netflix - ce qui faisait de la proposition de Bell une offre parmi tant d'autres.

Le CRTC en était mercredi à la troisième journée de ses audiences publiques pour déterminer si le géant des télécommunications devrait pouvoir conclure une entente pour grossir davantage.

Cogeco, quatrième entreprise de câblodistribution en importance au Canada, a estimé que l'entente, qualifiée de «méga transaction», accorderait trop de pouvoir à Bell.

«Les consommateurs du Québec et du Canada ne sont pas dupes. Ils comprennent très bien qu'il y aura moins de concurrence si la méga transaction est approuvée, et combien il leur en coûtera en fin de compte», a déclaré Louis Audet, président et chef de la direction de Cogeco.

Par ailleurs, le Syndicat des communications, de l'énergie et du papier (SCEP), l'un des plus importants syndicats des médias au pays, a sonné l'alarme à propos de l'offre d'achat déposée par Bell.

Bell possède déjà le réseau de télévision CTV et l'ancien groupe de radio CHUM, ainsi qu'une longue liste de chaînes spécialisées, sans oublier Bell Canada, la plus importante entreprise de télécommunications du pays.

Le SCEP a déclaré à l'organisme fédéral de réglementation que la concentration des médias au pays avait de graves conséquences.

Selon le vice-président du syndicat, Peter Murdoch, la concentration des médias, en plus de réduire la diversité et d'affaiblir la concurrence, a réduit les possibilités d'emploi dans le domaine de la création de contenu.

Voilà pourquoi, a-t-il dit, le SCEP s'oppose à l'entente.

Si le CRTC approuve la vente, il devrait s'assurer que Bell renforcera la programmation originale de nouvelles locales, a ajouté M. Murdoch.

«Vous pourriez l'approuver, cependant, si les preuves qui vous sont présentées établissent que la vente bénéficierait de façon significative et sans équivoque aux Canadiens et au secteur de la télédiffusion, et si ces avantages dépassent les graves inquiétudes qu'a soulevées la proposition, particulièrement pour le secteur de l'information et des nouvelles locales», a-t-il déclaré.

Selon M. Murdoch, le CRTC devrait exiger de Bell des investissements de 43,5 millions $ dans la production de nouvelles à la radio et à la télévision.

Le syndicat soutient également que depuis 2008, CTV a réduit de 24 pour cent son personnel dans le secteur de la télévision, incluant 233 emplois depuis son acquisition par BCE. Astral a de son côté réduit ses dépenses en nouvelles radio de huit pour cent depuis 2008, a ajouté M. Murdoch.

Québecor et Telus ont déjà exprimé leurs inquiétudes concernant l'offre d'achat qui, selon eux, donnerait trop de contrôle à Bell au sein du paysage canadien de la télédiffusion. Le câblodistributeur Shaw y est pour sa part favorable.

Bell, de son côté, a affirmé que l'achat d'Astral Media permettrait une plus grande concurrence sur le marché francophone québécois, qui est dominé par Québecor. L'entreprise soutient également qu'elle posséderait, à la suite de la transaction, 33,5 pour cent du marché télévisuel anglophone et 24,4 pour cent du marché francophone.

Le projet d'acquisition vise à créer un empire médiatique qui s'attaquerait à ses rivaux en matière d'offre de contenu numérique aux consommateurs, via divers services en ligne et appareils mobiles tels que les téléphones intelligents et les tablettes électroniques.

L'ACTRA, un syndicat qui représente des artistes de partout au pays, appuie la transaction, mais à certaines conditions.