La conférence d'affaires C2-MTL présente jusqu'à vendredi une vingtaine de conférenciers renommés, tous liés d'une manière ou d'une autre à la créativité et à l'innovation. L'événement protéiforme se tient dans le complexe industriel patrimonial New City Gas, récemment restauré et réaménagé. Le Dr Rex Jung y présentera une conférence demain.

Le petit Picasso en vous s'active dans la partie antérieure de votre cerveau.

Car c'est le lobe frontal qui s'anime quand le cerveau de l'homme (et de la femme) est la proie d'une pétillante fièvre créatrice.

L'intelligence - telle qu'on la conçoit habituellement du moins - a peu à y voir.

«La créativité et l'intelligence ne sont pas synonymes», soutient le Dr Rex Jung, praticien en neuropsychologie et professeur adjoint de neurochirurgie à l'Université du Nouveau-Mexique. Ce sera le principal message de sa présentation à la conférence Commerce " Créativité Montréal (C2-MTL), demain: «Nous avons besoin d'aller au-delà de cette notion que la créativité siège dans le côté droit du cerveau, qu'elle est presque associée au génie, ou qu'il faut être superintelligent pour être créatif», a-t-il exprimé lors d'un entretien téléphonique.

Le Dr Jung s'intéresse à l'efficacité et à la multiplicité des synapses en phase créative. «C'est la neuro-imagerie structurale qui nous permet de voir comment la créativité a été gravée dans votre cerveau, avec le temps et la répétition d'activités créatrices», explique-t-il.

Ses recherches lui ont réservé des surprises - c'est le propre de la créativité que de susciter la surprise. «Dans le cas de l'intelligence, plus, c'est mieux, décrit-il. Plus de matière grise, plus de connexions, plus d'activité cérébrale, tout cela est associé à l'intelligence. Mais pour la créativité, moins, c'est mieux.»

Dans le lobe frontal du cerveau, des parois corticales plus minces, des neurones moins nombreux et moins densément connectés sont en corrélation avec la créativité. «C'est très étonnant», s'exclame-t-il.

C'est comme si, dans une contrée moins creusée par les ornières de l'habitude, moins sillonnée d'autoroutes, les réflexions pouvaient plus facilement folâtrer dans les champs, faire des parcours inédits, découvrir des paysages cachés.

Les personnes très créatives montrent ces caractéristiques cérébrales, mais il est difficile de savoir dans quelle mesure il s'agit d'un avantage génétique ou du résultat d'une activité créatrice répétée. «La meilleure hypothèse est que 50% est d'origine génétique, au travers des différentes caractéristiques de votre cerveau, et que 50% est lié à l'environnement - vous pouvez donc les moduler et les modifier avec les expériences et l'apprentissage», énonce le Dr Jung.

Certaines personnes ont appris à induire une «régulation négative» du lobe frontal, c'est-à-dire à le désensibiliser temporairement, pour faciliter l'émergence des idées. Bref, ils ferment temporairement les bretelles d'accès des autoroutes cérébrales et ralentissent la circulation pour favoriser les petites voies de traverse. «Ils prennent par exemple une longue marche, ou un bain prolongé, font de la méditation ou prennent un verre d'alcool, décrit le Dr Jung. Il y a plusieurs manières d'y parvenir.»

«Mais vous aurez besoin de votre lobe frontal plus tard, ajoute-t-il en riant. Vous ne voulez pas le déstructurer complètement afin d'être plus créatif. Il y a d'autres aspects à la créativité, comme la persévérance.»

C'est la démonstration neurologique du vieil aphorisme de Thomas Edison: l'invention, c'est 1% d'inspiration et 99% de transpiration - les proportions peuvent varier.

Créativité scientifique

Le Dr Jung s'intéresse actuellement à la créativité dans la sphère des «STIM» - science, technologie, ingénierie, mathématiques, ou STEM, dans la langue de Newton.

Les innovations de l'avenir naîtront dans les cerveaux d'enfants qui, à l'heure actuelle, sont submergés de stimulations et d'informations.

«Les enfants et les étudiants qui passent tellement de temps à remplir leur cerveau de connaissances n'auront peut-être pas le temps ou l'intérêt de se demander d'où viendra le prochain iPhone ou comment faire des améliorations majeures à l'internet, constate-t-il. Beaucoup de personnes s'en inquiètent. Si nous pouvons déterminer dans le cerveau comment la créativité fonctionne, nous pourrons mieux la susciter et la cultiver. Quel que soit votre classement dans le spectre de la créativité, vous pourrez maximiser votre potentiel.»

Rien à voir avec le génie.