Le problème était inconnu de plusieurs, mais pas d'une jeune entrepreneure de Québec. Les éleveurs de crevettes du monde entier peinent à mesurer avec certitude le nombre de larves qu'ils achètent de leurs fournisseurs. Il y a parfois jusqu'à 30% d'imprécision. Le dispositif créé par Valérie Robitaille et son équipe vient éliminer cet obstacle au commerce. Une solution que les juges du concours en entrepreneuriat Devtech 50 ont récompensée du premier prix.

Compter des larves microscopiques peu sembler banal, mais lorsque cela concerne des transactions de plusieurs dizaines de milliers de dollars, on peut en comprendre l'importance. «L'imprécision dans le calcul du nombre de larves mène parfois à des conflits violents entre les vendeurs de larves et les éleveurs de crevettes», explique Valérie Robitaille, présidente et cofondatrice de XpertSea Solutions.

La solution de son entreprise repose dans un contenant de 22 litres recouvert d'un appareillage mêlant capteurs optiques et procédés de photonique. En versant dans le réservoir de l'appareil des larves en suspension, on peut dorénavant mesurer leur nombre avec une précision supérieure à 95%. Dans son carnet de commandes, XpertSea compte déjà 100 unités qu'elle devra livrer principalement en Asie l'an prochain.

Si l'industrie de la crevette représente un marché important pour la jeune entreprise de Québec, sa présidente, biologiste marine de formation, compte tout de même adapter son produit à d'autres sphères, à commencer par celle de la recherche académique. Le dispositif de XpertSea compte déjà avec précision une gamme de petits poissons et de larves de mollusques. Valérie Robitaille croit bien qu'il fera sa place dans l'attirail des biologistes marins.

Et il y a plus. La présidente de XpertSea entend proposer d'ici deux ans un outil portatif aux travailleurs du secteur minier. «On croit qu'avec notre technologie, on peut développer un instrument qui pourra être utilisé sur le terrain pour faire une analyse préliminaire des minerais. Il y a un besoin dans ce secteur, et on croit pouvoir offrir une solution», indique-t-elle.

Pour le moment, l'entreprise de quatre employés est presque entièrement financée par des proches de Valérie Robitaille. «J'ai l'impression que c'est facile, lorsqu'on se lance en affaires avec trop d'argent, de tout dépenser rapidement. On nous dit que l'entreprise grandirait plus vite si on avait plus de ressources, mais pour le moment, je préfère faire augmenter la valeur intrinsèque de XpertSea avant de chercher du financement extérieur», dit-elle.

Cette vision entrepreneuriale, Valérie Robitaille la doit, selon elle, à son passage aux États-Unis alors qu'elle faisait un baccalauréat en sciences marines à l'Université du Maine. «La culture entrepreneuriale aux États-Unis, c'est gros, explique-t-elle. On y est exposé constamment, que ce soit par des livres ou des vidéos portant sur le développement d'entreprises. Au Québec, on n'est pas aussi exposé à ça, mais un concours comme le Devtech 50 est très bon pour corriger une partie du problème.»

Une compétition relevée

Le 10 novembre dernier, la finale du Devtech 50 a réuni à Québec les dirigeants de 10 entreprises des quatre coins de la province. Si XpertSea s'est démarquée en remportant la palme, d'autres ont aussi su tirer leur épingle du jeu.

B-Temia, une entreprise de Québec, met au point depuis deux ans un dispositif que ses dirigeants présentent comme un dermosquelette motorisé qui assiste la marche de ses usagers. Un outil qui pourrait trouver sa place dans le secteur de la santé d'ici quelques années, mais qui est d'abord voué au secteur militaire. L'entreprise travaille déjà de pair avec l'armée canadienne pour développer son produit. Derrière cette entreprise, qui a remporté le deuxième prix de la compétition, se trouve Stéphane Bédard, le même qui avait fondé il y a quelques années Victhom bionique humaine, un concepteur de prothèses motorisées.

Le troisième prix est revenu à Devolutions, une petite entreprise en technologie de l'information de Lavaltrie. Son fondateur et président, David Hervieux, a mis au point une solution à l'accumulation de tous les mots de passe qu'une personne peut posséder en créant une plateforme qui les rassemble tous. L'idée est bonne. L'outil qu'il rend disponible gratuitement sur le web est utilisé par une centaine de milliers de personnes déjà. C'est toutefois sa solution pour entreprises qui épate. Parmi ses clients, on compte déjà ABC, Dell, Canon, Shell et même l'OTAN.

En tout, les finalistes de la compétition Devtech 50 se sont partagé 90 000$ en prix et en services de lancement d'entreprise.