Face aux convulsions du capitalisme financier, les coopératives offrent une «réponse tangible» pour relancer l'économie mondiale, estime Monique Leroux, présidente du conseil et chef de la direction du Mouvement Desjardins, dans un entretien à l'AFP.

Le hasard fait bien les choses. Il y a trois ans, l'Assemblée générale des Nations unies proclamait 2012 «année internationale des coopératives», et c'est lundi que l'ONU doit inaugurer le début de cette année des coopératives ... à New York, où des manifestants «occupent» Wall Street pour dénoncer les excès du monde de la finance et les inégalités croissantes.

Les coopératives sont des entités ayant pour but de servir les intérêts économiques de leurs participants. L'Europe connaît surtout des coopératives agricoles, mais il y a aussi des coopératives financières qui assurent par exemple le micro-crédit ou deviennent des caisses d'épargne, à l'instar de Desjardins, qui compte 5,8 millions d'adhérents, principalement au Québec.

Ces adhérents contractent des prêts, des hypothèques, font leur opérations financières quotidiennes dans les caisses et touchent à la fin de l'année une part des profits de l'institution.

Avec la crise actuelle du capitalisme financier, «la conjoncture est favorable» au mode coopératif, lance la PDG du mouvement des caisses Desjardins, premier groupe financier coopératif au Canada, sixième dans le monde, fort d'actifs avoisinant 172 milliards de dollars. En 2012, il sera l'hôte du premier Sommet mondial sur les coopératives.

«Quand on regarde ce qui ce passe actuellement, on sent une forme de déconnexion entre les grands enjeux financiers» et «une grande partie de la population», dit-elle. «Cela nous semble parfois aussi bien loin des réalités de l'économie réelle».

Selon l'ONU, les coopératives -financières, agricoles, sanitaires, etc.- comptent plus de 800 millions de membres et emploient plus de 100 millions de personnes dans le monde. À elles seules, les 300 plus grandes coopératives totalisent des revenus annuels de 1100 milliards, «l'équivalent du PIB du Canada ou de l'Espagne», souligne la femme d'affaires de 57 ans.

Les coopératives offrent-elles une alternative aux grandes entreprises? «Le modèle coopératif c'est vraiment une réponse tangible aux enjeux à la fois économique et démocratique de nos sociétés», soutient-elle.

Les conseils d'administration des coopératives sont constitués de membres plutôt que de gestionnaires tributaires des actionnaires. Dans les coopératives, «on n'a pas un petit groupe de gens qui se connaissent entre eux, mais une représentation assez large des membres, des perspectives diversifiées».

Et dans les périodes de tumultes, ces organisations ont montré «leur résilience» car elles prennent des décisions à plus long terme orientées en théorie vers l'intérêt des membres, renchérit-elle.

«Prendre des décisions à court terme, trimestrielles, pour faire monter le prix de l'action, ce n'est pas du tout une motivation autour de la table des conseils d'administration (des coopératives, ndlr), ni même dans les équipes de direction», résume l'une des femmes les plus influentes du Canada.

Des critiques jugent que les coopératives calquent les comportements des grandes entreprises lorsqu'elles veulent les concurrencer, d'où le défi de trouver ce difficile équilibre entre le capital financier et humain, les revenus et les hommes, en développant les coopératives.

Le «milieu des grandes entreprises est généralement plus organisé que le milieu coopératif», d'où l'intérêt de réunir petites, moyennes et grandes coopératives pour un premier Sommet mondial à Québec, à l'octobre 2012, afin de structurer ces organisations et assurer leur pérennité dans l'économie mondiale.