Le parcomètre futuriste testé à San Francisco pourrait-il être implanté à Montréal? Pas en claquant des doigts, a constaté le maire du Plateau-Mont-Royal, Luc Ferrandez, qui s'est inspiré de la ville californienne pour proposer une réforme du stationnement controversée dans son arrondissement.

Le maire Ferrandez a annoncé l'an dernier l'ajout de 600 parcomètres dans le Plateau ainsi qu'une hausse de tarifs graduelle de 2$ à 3$.

M. Ferrandez, du parti Projet Montréal, s'est inspiré des travaux du professeur Donald Shoup et de l'expérience de San Francisco pour initier sa réforme. Or, entre la théorie et la pratique, il y a un pas difficile à franchir.

À l'origine, le maire souhaitait moduler les tarifs. Garer sa voiture aurait coûté plus cher au coin des rues Mont-Royal et Saint-Denis, où la circulation est plus dense, et moins cher sur l'avenue du Mont-Royal Est, où elle l'est moins. Mais il n'est pas possible de moduler les tarifs des parcomètres montréalais de manière aussi précise, ni de changer les tarifs en temps réel.

«Sans doute que ça aurait été beaucoup plus performant, constate M. Ferrandez. En facturant partout au même prix, là où il y a moins d'achalandage et du stationnement gratuit dans les rues résidentielles, les gens vont aller dans les rues résidentielles.»

Le Plateau compte par ailleurs plusieurs rues résidentielles où le stationnement est gratuit. Les automobilistes qui veulent éviter les parcomètres peuvent y trouver des places.

«Ça fausse tout le calcul de l'offre et de la demande», résume le maire.

Le Plateau-Mont-Royal mettra bientôt en place le «parcojour», un dispositif qui permettra aux automobilistes de se garer pour de longues périodes. Et contrairement aux parcomètres, le maire Ferrandez affirme que les tarifs de ces dispositifs varieront dans différents secteurs en fonction de l'achalandage.

La Presse Affaires a demandé à Stationnement de Montréal, l'organisme paramunicipal qui gère les parcomètres, si un système semblable à SF Park pouvait être implanté chez nous.

«Je ne sais pas», a répondu sa porte-parole, Sophie Charette.

Elle souligne que les bornes testées en Californie, qui comprennent des capteurs installés dans le sol, pourraient difficilement être implantés dans une métropole où il neige plusieurs mois par année.

Controverse

Les restrictions techniques ne sont pas les seuls obstacles auxquels s'est heurtée l'administration Ferrandez dans sa réforme du stationnement. Les marchands du Plateau ont vertement critiqué son plan. Ils estiment en avoir plein les bras avec la concurrence des centres d'achats en banlieue, où le stationnement est gratuit et abondant.

«Toutes les nouvelles formes de contraintes sur le stationnement sont jugées par les commerçants comme étant négatives, reconnaît M. Ferrandez. Mais souvent, à long terme, ils s'y adaptent parce qu'ils se rendent compte que l'effet est beaucoup plus limité qu'ils le pensaient sur leur commerce.»

Il reste que les autorités municipales, tout comme les marchands, auraient intérêt à suivre l'expérience de San Francisco de près, estime Adam Millard-Ball, assistant professeur de géographie à l'Université McGill. Selon lui, les marchands pourraient profiter d'une tarification plus intelligente du stationnement, même si cela implique des augmentations dans certains secteurs.

«La difficulté de trouver une place de stationnement est un inconvénient beaucoup plus important que le tarif des parcomètres, estime ce chercheur. Dans plusieurs cas, les gens sont prêts à payer un prix plus élevé et ne pas avoir à tourner en rond 15 minutes le temps de trouver une place.»