L'Union européenne donne une chance au boeuf canadien. En vertu d'une entente entre le Canada et la Commission européenne, l'industrie bovine canadienne aura accès à un contingent d'exportations de viande sans tarif et pourrait bonifier ses ventes de 10 millions de dollars. Mais sur un point, l'Europe ne bronche pas: toute viande d'un animal traité aux hormones reste interdite d'entrée sur le Vieux Continent.

Le Canada exporte environ 1000 tonnes de viande bovine par année en Union européenne (UE), en dépit de tarifs douaniers de 20% imposés par Bruxelles. La nouvelle entente permet aux exportateurs canadiens d'accéder à un contingent libre de tarifs de 20 000 tonnes. Mais le Canada devra partager ce contingent avec les Américains et les Australiens, qui y ont déjà accès.

Gib Drury, président du conseil de la Fédération des exportateurs de boeuf du Canada, prévoit que le pays pourra aller chercher 10% de ce quota. «Cela représente quand même 10 millions de plus en exportations», précise-t-il dans une entrevue à La Presse Affaires.

«L'Europe est un marché très lucratif pour nous, explique M. Drury. Les Européens n'ont plus de surplus de viande. Ils ont de l'argent et ils paient leurs factures. Et hormis la question des hormones, ils ont des règles d'abattage et d'emballage similaires aux nôtres.»

Selon M. Drury, il en coûte 100$ de plus par tête pour produire un boeuf sans hormones. Mais le prix de vente en Europe est de 200$ plus élevé qu'au Canada. L'arithmétique est claire: «Il est plus avantageux de vendre notre boeuf en Europe», dit M. Drury.

Même si une minorité de producteurs canadiens ne font pas appel aux hormones, le ministère de l'Agriculture assure que le pays pourra répondre à cette nouvelle ouverture européenne. La filière québécoise du veau, qui produit déjà sans hormones, devrait en profiter, estime Gib Drury.

Un différend d'une décennie

Depuis 1989, l'Union européenne n'accepte plus d'importer du boeuf traité aux hormones.

Le Canada, qui soutient que ces hormones sont sans danger, s'est plaint à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en 1999 et avait imposé en représailles des tarifs douaniers sur les cornichons, le boeuf et les côtes de porc. Le différend perdure depuis.

Mais le Canada et la Commission européenne ont aussi annoncé hier la signature d'un protocole d'entente qui prépare le terrain voie au règlement devant l'OMC, selon le ministre fédéral de l'Agriculture, Jean-Pierre Blackburn.

Cette entente permettra d'ajouter 3200 tonnes au contingent actuel de 20 000 tonnes, en guise d'indemnisation pour l'interdiction européenne des hormones de croissance.

Les négociations de libre-échange entre le Canada et l'UE pourraient permettre d'aller encore plus loin dans l'ouverture des frontières européennes. «On espère toujours ouvrir les marchés le plus largement possible», dit M. Blackburn.

Selon Gib Drury, les exportateurs canadiens pourraient assez rapidement fournir jusqu'à 20 000 tonnes de viande bovine au marché européen si les barrières tombaient.