Au lendemain de la fermeture de son laboratoire de Kirkland, la haute direction de Merck (MRK) jure ne pas avoir fait de croix sur la recherche pharmaceutique au Canada. Mais c'est désormais sans laboratoire, en finançant la science des autres et en signant des partenariats, qu'elle compte le faire.

Le complexe de Merck de l'ouest de l'île de Montréal était bien silencieux hier. Vendredi dernier, les 180 employés de son centre de recherche ont quitté l'endroit pour ne plus y revenir. Sa fermeture, annoncée en juillet, avait provoqué un électrochoc dans l'industrie montréalaise.

C'est pourtant là qu'Adam Schechter, président de la filiale Santé humaine de la multinationale, a rencontré La Presse Affaires pour une entrevue exclusive.

«Nous croyons que les capacités scientifiques au Québec sont très fortes et nous allons investir très significativement ici dans la recherche scientifique», a affirmé cet Américain de 46 ans, de passage à Montréal pour quelques jours.

Mais Merck ne le fera pas en payant des chercheurs dans des laboratoires. Avec la fermeture de celui de Kirkland, l'entreprise ne possède plus de centre de recherche en sol canadien.

«Nous n'avons plus de brique et de mortier, mais la plupart des pays dans le monde n'en ont pas, dit M. Schechter. Il y a 20 ans, la vaste majorité de la recherche s'effectuait au sein des compagnies pharmaceutiques. Aujourd'hui, ça se fait largement ailleurs - dans les entreprises de biotechnologie, dans les universités, les installations gouvernementales.»

Au Canada, Merck comptera donc désormais sur un «éclaireur» pour repérer la meilleure recherche. Si celui-ci découvre des choses intéressantes, Merck pourra signer des partenariats avec les universités ou les biotechs concernées.

En fermant son centre de recherche, Merck s'était engagée à investir 100 millions en recherche et développement au Québec en cinq ans.

Malgré la fermeture du centre de Kirkland et la multiplication des partenariats, Merck affirme encore croire à la recherche interne.

«Nous allons continuer à mettre l'accent sur la science», dit M. Schechter.

Dans ce contexte, comment expliquer la fermeture du centre québécois? M. Schechter la justifie par la fusion entre Merck et Schering-Plough, une transaction qui a fêté son premier anniversaire la semaine dernière.

L'homme est bien placé pour en parler: l'intégration des deux entreprises, c'est lui qui la pilote. Selon lui, ce n'est pas ni la performance du centre de recherche québécois ni ses coûts d'exploitation qui ont mené à sa fermeture.

«Quand vous amenez deux grandes entreprises ensemble, il y a des décisions difficiles à prendre. Ce que vous voulez faire, c'est réunir les meilleurs chercheurs et les faire travailler ensemble pour créer des synergies. Il faut penser à replacer ces gens aux meilleurs endroits. Ces décisions sont toujours difficiles et sont prises en fonction d'une multitude de facteurs.»

Merck Canada a aussi confirmé hier qu'elle songeait à déménager les 450 travailleurs qui demeurent au siège social canadien de Kirkland, le complexe s'avérant maintenant trop grand pour eux. Les 150 travailleurs de l'ancien siège social canadien de Schering-Plough, situé juste en face, pourraient les y rejoindre. À la suite de la fusion, Merck compte aujourd'hui 1600 employés au Canada.