Alors que les audiences du CRTC mettant en présence les entreprises de distribution et les réseaux de télévision viennent de commencer, le président et chef de la direction du groupe Quebecor, Pierre Karl Péladeau, affirme que la situation de la télévision conventionnelle au pays s'est encore détériorée ces derniers mois.

Il espère donc que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) ne fera plus la sourde oreille aux demandes répétées des télévisions généralistes privées afin d'obtenir des redevances d'abonnement au câble, comme c'est le cas pour les chaînes spécialisées.

«Il y a eu une détérioration notable depuis quelques mois. Est-ce que c'est seulement lié à l'aspect récessionnaire, à l'aspect économique? C'est indéniable que quelque part aussi ces éléments-là participent à ce déclin, participent à cette érosion, aux difficultés financières. Est-ce que c'est uniquement ça? Non. Depuis trois ans, on constate qu'il y a un déclin, et ce n'est pas juste non plus de la télévision conventionnelle, c'est aussi de ces médias qui étaient installés et qui régnaient en rois et maîtres, antérieurement, qui font face à un environnement concurrentiel qui fait en sorte qu'on doit changer les modèles d'affaires», a opiné M. Péladeau, mardi, en marge d'un colloque organisé par la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Quebecor n'a pas voulu s'associer aux autres grands câblodistributeurs du pays qui ont mené, au cours des derniers mois, une campagne publicitaire contre la volonté des télévisions généralistes d'obtenir ainsi de telles redevances d'abonnement.

«Honnêtement, je pense qu'il y a eu un grand exercice de désinformation à l'intérieur de ces campagnes de publicité. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle on n'a pas voulu y participer», a expliqué M. Péladeau.

Fait à noter, Quebecor a la particularité d'être à la fois propriétaire du plus important réseau de télévision privée au Québec, TVA, et du plus important câblodistributeur au Québec, Vidéotron. Le groupe possède également des chaînes spécialisées, comme LCN.

D'autres câblodistributeurs au pays ont déjà menacé de hausser substantiellement la facture des abonnés, si les télévisions généralistes devaient obtenir de telles redevances, mais M. Péladeau n'a pas voulu dire si Vidéotron hausserait d'autant la facture.

«En quoi va résulter une éventuelle décision (du CRTC)? Il est trop tôt pour spéculer sur quelque chose dont on ne connaît pas, à l'heure actuelle, les tenants et aboutissants», a-t-il répliqué.

«Il faut regarder ça froidement, avec la distance nécessaire. C'est vrai que c'est probablement devenu trop émotif. Quand je vois qu'il y a des gens qui ont menacé de couper le signal, ça m'apparaît tout à fait inapproprié», a-t-il opiné.

M. Péladeau a fait ces commentaires lors d'une rencontre avec la presse, après avoir pris la parole lors d'un colloque de la Caisse de dépôt sur l'avenir des entreprises québécoises dans le nouvel ordre économique mondial.

Frein au Québec inc.

Dans son allocution, M. Péladeau a notamment déploré le fait que ce qu'on appelait jadis le Québec inc. «s'est amenuisé» depuis quelques années.

«Quand je suis sorti de l'université, le Québec inc., c'était une fierté particulière. On se reconnaissait dans ce développement économique. Aujourd'hui on entend moins parler de ça, il y a moins de mise en valeur de cet élément-là.»

Il a déploré l'existence de «freins» au développement de ce Québec inc.

Interrogé après son allocution, M. Péladeau a notamment attribué ces freins au Code du travail du Québec. «Ce n'est pas toujours facile, effectivement. Le Code du travail est de plus en plus désuet. Au Québec, on a le taux de syndicalisation le plus élevé en Amérique du Nord. Ce n'est pas nécessairement l'élément qui nous amène à avoir le plus de flexibilité», a-t-il avancé.