Tout en se gardant de prêcher l'optimisme, l'équipe d'économistes de Desjardins croit maintenant que la récession mondiale frappera un peu moins le Québec qu'elle l'avait cru, il y a un mois à peine.

Dans la Mise à jour des prévisions économiques et financières, l'économiste en chef François Dupuis et l'économiste en chef adjoint Yves Saint-Maurice s'avouent un peu surpris par la résilience du consommateur québécois, comme en font foi les rebonds des ventes au détail. «Le premier trimestre sera donc moins négatif que prévu au chapitre des dépenses de consommation, écrivent-ils. Cela nous amène à revoir nos prévisions du PIB (produit intérieur brut) réel à -1,8% pour 2009 comparativement à -1,9% le mois dernier», ce qui est mieux que l'ensemble canadien. Pour l'an prochain cependant, le Québec fera moins bien que la moyenne canadienne avec une expansion contenue à 1,1%, soit moins encore que celle de l'Ontario qui traverse une deuxième année de décroissance d'affilée.

MM. Dupuis et Saint-Maurice font preuve de moins d'engouement pour notre production manufacturière, durement touchée par l'affaiblissement récent du secteur aéronautique.

La prévision de Desjardins pour le Canada reste à -2,9% pour l'année en cours. Le pire toutefois paraît derrière nous.

On saura la semaine prochaine l'ampleur de la décroissance au premier trimestre. L'institution lévisienne table sur un chiffre de -6,5% en rythme annualisé. C'est beaucoup plus prononcé que les -3,4% du dernier trimestre de 2008.

Mince consolation, le Canada devrait renouer timidement (0,3% en rythme annualisé) avec la croissance l'automne prochain, grâce surtout au redémarrage des activités de stockage des entreprises. La reprise sera molle cependant, car Desjardins limite à 1,4% sa prévision d'expansion pour 2010. Le volume des exportations continuera de diminuer tout au long de l'année et le plus gros de l'an prochain.

Il faut dire que les États-Unis sont encore loin d'une sortie de crise avec un nouveau plancher des mises en chantier atteint en avril. En outre, le taux de chômage continue de grimper même si l'ampleur des licenciements au cours des mois à venir ne sera pas forcément aussi brutale que celle des premiers mois de 2009. «La dégradation du marché du travail devrait se poursuivre jusqu'au début de 2010 et le taux de chômage dépassera sans doute les 10%», écrivent les deux économistes, au moment où les Américains s'apprêteront à retourner aux urnes pour les élections de mi-mandat au Congrès.

MM. Dupuis et Saint-Maurice mettent en garde contre la tentation d'un optimisme hâtif fondé sur quelques récentes nouvelles encourageantes. Tout en affirmant que la récession paraît s'approcher de son point d'inflexion, ils apportent cette distinction de taille. «Il faut faire une distinction entre un point d'inflexion, qui signifie que l'économie va continuer à décroître, mais à un rythme moins rapide que ce qu'on a vu jusqu'ici, et le point de retournement de l'économie, qui déterminera le creux de la récession et annoncera le début de celle-ci.»

Ils écartent qu'elle prenne la forme d'un V. Ils tablent plutôt sur une reprise en U. C'est certainement moins mauvais qu'un scénario en W, qui signifierait une rechute vers un nouveau creux, ou en L, qui suppose que la récession soit suivie d'un long épisode de stagnation.