Jean Charest fait encore appel à l'ancien premier ministre péquiste Pierre Marc Johnson, cette fois pour représenter le Québec dans les négociations sur un accord économique entre le Canada et l'Union européenne.

Le premier ministre entend d'ailleurs profiter de ces négociations pour convaincre l'Europe des 27 de renoncer à imposer un embargo sur les produits dérivés du phoque.

Jean Charest a annoncé la nomination de M. Johnson à titre de «négociateur en chef du Québec» hier, après que son homologue fédéral Stephen Harper et les présidents de l'UE et de la Commission européenne eurent donné le coup d'envoi des pourparlers à l'occasion du Sommet Canada-UE à Prague.

Pour justifier son choix, Jean Charest a indiqué que M. Johnson est «une personne exceptionnelle qui connaît aussi bien les négociations commerciales à l'échelle internationale que le fonctionnement et les intérêts du gouvernement. «Il a l'autorité et l'expérience pour mener les négociations», a-t-il ajouté. Selon lui, ce choix «transcende la partisanerie politique».

Jean Charest avait choisi M. Johnson pour présider la commission d'enquête sur l'effondrement du viaduc de la Concorde à Laval. Il l'avait aussi nommé l'automne dernier à la tête de la délégation québécoise dans le cadre d'une mission économique en Chine parce qu'il ne pouvait s'y rendre lui-même en raison de sa décision de déclencher des élections. M. Johnson avait aussi représenté le Québec dans le dossier opposant le Canada et les États-Unis sur le bois d'oeuvre.

L'ancien chef péquiste dit envisager les négociations «avec beaucoup d'enthousiasme». «Sans vous dire que ça va être une partie de plaisir, je pense que ça va être intéressant», a-t-il lancé.

En temps réel

Ottawa mènera les négociations sur un accord transatlantique, mais le Québec «sera à la table pour les sujets qui touchent nos compétences et les compétences partagées», a indiqué Jean Charest. «Et nous allons être consultés sur les enjeux de compétence fédérale. On est là dans la pièce en temps réel».

Toutes les provinces peuvent avoir une place dans ses négociations. «C'est la première fois que le gouvernement fédéral nous reconnaît de manière aussi formelle», a-t-il ajouté. Les provinces doivent donner leur accord pour qu'un traité international soit mis en oeuvre au Canada.

Jean Charest souhaite que les négociations mènent à l'élimination de certaines barrières tarifaires (6% sur les produits d'aluminium; 2% sur ceux de l'aéronautique). Il milite pour une entente sur la mobilité de la main-d'oeuvre, à l'image de celle conclue avec la France. Il veut des «ententes de coopération» dans les secteurs de la culture et de la recherche scientifique.

Selon Jean Charest, les négociations dureront deux ans avec l'Europe. «C'est important que l'échéancier soit serré pour donner du momentum à la négociation, maintenir l'intérêt des parties», a-t-il affirmé.

Le Canada et l'UE lancent les négociations pour éliminer des barrières au commerce au moment où le Parlement européen a décidé d'en ériger. Il a voté massivement en faveur d'un embargo sur les produits dérivés du phoque qui entrera en vigueur l'an prochain. Cette décision «n'est pas fondée sur une évaluation rationnelle de la façon dont la chasse se fait, a dit Jean Charest. Les négociations nous donnent l'occasion d'être en contact avec nos vis-à-vis européens et de revenir sur ce dossier pour qu'ils puissent adopter une position plus raisonnable que celle qui a été adoptée».

La chef du Parti québécois, Pauline Marois, a commenté du bout des lèvres la nomination de Pierre Marc Johnson à titre de négociateur du Québec. «Je le connais bien. Il a des compétences dans ce domaine. Je souhaite tout simplement qu'il réussisse», a-t-elle affirmé.