La Banque du Canada devrait abaisser son taux directeur de 50 centièmes demain, mais personne ne s'attend à ce que cette baisse produise des miracles.

Le taux directeur de la banque centrale est actuellement à 1%, un creux depuis un demi-siècle. Les analystes penchent pour une nouvelle baisse variant entre 25 et 50 points centésimaux, avec une moyenne de 40 centièmes.

 

Mais qu'importe, disent les observateurs, la détente monétaire ne semble plus avoir de grands effets sur la relance de l'économie parce que les faibles taux de la Banque du Canada ne sont pratiquement pas refilés aux entreprises et aux consommateurs.

«Le taux de la Banque du Canada baisse, mais qui s'en soucie? Il faut que le coût des fonds des banques soit plus près de celui de la Banque du Canada. Le plus important, ce n'est donc pas la baisse de taux à proprement parler, mais la fluidité des lignes de conduite entre les banques», explique François Barrière, vice-président, marchés internationaux, de la Banque Laurentienne.

Hypothèque résidentielle

François Barrière donne l'exemple des hypothèques résidentielles. Les prêts hypothécaires à échéance de cinq ans se négocient entre 4,6 et 5,75% actuellement. Ces taux sont donc de quelque 300 centièmes plus élevés que les obligations du Canada au même terme (2,06%). Or, cet écart a déjà été de 150 centièmes. Les taux aux consommateurs et aux entreprises sont donc encore trop élevés.

Autre exemple: le taux préférentiel des banques - celui qu'elles offrent à leurs meilleurs clients - est de 3%. Ce taux est de 200 centièmes plus élevé que le taux directeur de la Banque du Canada, un écart plus important que les 150 centièmes d'avant la crise.

«Il faut que les acteurs du marché qui ont de l'argent le placent dans les banques et non plus seulement dans les bons du Trésor, qui ne rapportent plus rien. Ce faisant, le coût des fonds des banques diminuera», dit M. Barrière.

Le stratège de la Banque Scotia, Vincent Delisle, croit que la baisse des taux n'est pas suffisante pour relancer l'économie. «À 0,5% ou 0,75%, le taux directeur est très bas. Mais même s'il joue avec les instruments monétaires, le Canada est à la remorque de ce qui se passe aux États-Unis», dit M. Delisle.

Vendredi, le bureau du Commerce américain a révisé les chiffres du PIB pour le quatrième trimestre de 2008. La baisse du PIB américain n'est plus de 3,8%, comme on l'avait calculé précédemment, mais de 6,2%. Les analystes prévoyaient 5,4%. Il s'agit de la pire décroissance du PIB depuis 1982 (-6,4%).

Le Japon et l'Allemagne vivent des situations encore plus dramatiques, fait remarquer M. Delisle, avec des reculs du PIB au quatrième trimestre de 12,7% et 8,4% respectivement. Au Canada, les analystes s'attendent à ce que le PIB recule de 3,6%. Les chiffres seront connus ce matin.

Il faut donc espérer que les mesures de relance des gouvernements commencent à porter leurs fruits dans les prochains mois, tant aux États-Unis qu'au Canada.

Quoi qu'il en soit, la Banque du Canada en est possiblement à sa dernière baisse de taux, croit le stratège de la Banque TD, Charmaine Buskas. «Baisser les taux davantage créerait trop de difficultés techniques pour en justifier les bénéfices», dit-il.