Le gouvernement français a menacé lundi deux des principales banques du pays de les écarter du plan d'aide de 21 milliards d'euros accordé à ce secteur, si leurs dirigeants maintenaient leur refus de renoncer à des bonus annuels de centaines de milliers d'euros.

Le gouvernement français a menacé lundi deux des principales banques du pays de les écarter du plan d'aide de 21 milliards d'euros accordé à ce secteur, si leurs dirigeants maintenaient leur refus de renoncer à des bonus annuels de centaines de milliers d'euros.

«Les banques doivent comprendre que nous avons changé d'époque», a déclaré la ministre de l'Economie, Christine Lagarde. Si elles ne renoncent pas à ces pratiques, les banques «devront trouver un autre guichet» que celui de l'État pour faire face à la crise financière, «mais je n'en connais pas d'autre», a-t-elle souligné dans un entretien publié par le quotidien Les Echos.

Le président Nicolas Sarkozy a demandé jeudi aux dirigeants des banques françaises de renoncer à la part variable de leurs rémunérations sur les résultats de 2008 - des bonus qui se chiffrent en centaines de milliers d'euros - en contrepartie du soutien financier apporté par l'État.

«C'est bien la moindre des choses», a souligné M. Sarkozy, qui devait réunir mardi les dirigeants des banques à l'Elysée. Il s'en était déjà pris l'année dernière aux «parachutes dorés», les généreuses indemnités de départ des grands patrons français.

Les dirigeants de BNP Paribas, l'une des toutes premières banques en Europe, qui a bénéficié du soutien de l'État pour faire face à de grosses difficultés liées à la crise financière, ont fait savoir dès samedi qu'ils se pliaient à cette exigence.

Un porte-parole de BNP Paribas a annoncé que le président de la banque, Michel Pébereau, et le directeur général, Baudouin Prot, avaient «décidé d'indiquer à leur conseil d'administration qu'ils renonçaient à leur rémunération variable».

Ils avaient l'an dernier respectivement touché 875 000 et 2,27 millions d'euros (1,4 et 3,7 M$ CA).

Mais le directeur général d'une autre grande banque française, le Crédit Agricole, a refusé en substance de prendre la même initiative.

Georges Pauget a souligné dans un communiqué dimanche que sa rémunération serait décidée «en application des lois et règlements en vigueur» par «des instances spécifiques représentant les actionnaires - comité des rémunérations et Conseil d'administration».

Selon le Journal du Dimanche, le directeur général de la Société Générale, Frédéric Oudéa, aurait également refusé de renoncer de son plein gré à son bonus.

«Aucune polémique ne saurait exister sur ce sujet» avec l'État, a assuré son collègue du Crédit Agricole.

Mais le parti UMP (Union pour un mouvement populaire, droite au pouvoir), qui y voit une «question de morale», a averti qu'il ferait connaître à l'opinion publique les banquiers récalcitrants, selon son porte-parole, Frédéric Lefebvre.

La ministre de l'Economie a de son côté également envisagé de réclamer une limitation des dividendes versés aux actionnaires.

«Même si je comprends qu'une banque veuille attirer des investisseurs en distribuant des dividendes, il y a dividende et dividende. A tout le moins, la part de résultat distribuée en dividendes devra être limitée afin d'augmenter la part mise en réserve et le renforcement des fonds propres», a-t-elle dit.

L'État a accordé en décembre à six banques françaises une première tranche de prêts de 10,5 milliards d'euros, dans le cadre d'un plan global de 360 milliards (dont 320 pour garantir les prêts interbancaires).

Le ministère des Finances a annoncé la semaine dernière une nouvelle tranche de 10,5 milliards d'euros d'ici à la fin du premier trimestre, ce qui porterait l'aide publique à 21 milliards d'euros.

Six grandes banques avaient bénéficié de la première tranche: le Crédit Agricole, BNP Paribas, la Société Générale, le Crédit Mutuel, la Caisse d'Epargne et la Banque Populaire.