Un Québécois a fondé en Alberta une compagnie qui figure en tête de peloton dans la course aux dirigeables-cargo. Plusieurs experts pensent que ces ballons géants sont appelés à jouer un rôle crucial dans le développement économique du Grand Nord et de l'Arctique, à cause des difficultés de transport.

Un Québécois a fondé en Alberta une compagnie qui figure en tête de peloton dans la course aux dirigeables-cargo. Plusieurs experts pensent que ces ballons géants sont appelés à jouer un rôle crucial dans le développement économique du Grand Nord et de l'Arctique, à cause des difficultés de transport.

Skyhook a signé cet été un contrat avec Boeing pour la construction de deux prototypes du JHL-40, développé par la compagnie de Calgary, qui pourra transporter des charges de 40 tonnes, deux fois plus que le plus gros hélicoptère au monde, sur une distance de 370 kilomètres. Skyhook estime que le JHL-40, qui fera 100 mètres de long, entrera en service en 2012.

«Les avancées en systèmes automatisés de pilotage et en matériaux résistants et légers rendent maintenant possible l'opération de dirigeables-cargo», explique le fondateur de Skyhook, Peter Jess, qui a grandi à Bedford dans les Cantons-de-l'Est et travaille depuis 30 ans en Alberta comme pilote d'hélicoptère et spécialiste de logistique.

«Le système de propulsion du JHL-40 est tellement complexe qu'aucun pilote ne pourrait l'opérer manuellement de façon efficace.»

Le dirigeable a quatre rotors d'hélicoptère pour contrôler son altitude, et quatre turbopropulseurs pour avancer à une vitesse de 150 km/h.

L'Alberta est à l'avant-plan de la révolution des dirigeables-cargo. Une autre compagnie, World SkyCat, a créé en Alberta l'une de ses premières filiales.

Son dirigeable, SkyCat, est encore plus massif: plus de 300 mètres de longueur, pour une capacité de 200 tonnes de cargo avec un rayon d'action de 3000 kilomètres. Mis à part l'Antonov 225, qui transporte 250 tonnes mais dont il n'existe qu'un seul exemplaire au monde, les plus gros avions cargo transportent 125 tonnes.

Prototype

La compagnie britannique a annoncé un test de prototype cette année. World SkyCat était auparavant associée à Lockheed Martin, qui a testé un dirigeable semblable au design du SkyCat (on peut voir une vidéo sur Youtube en tapant "Lockheed Martin Turbo Super Blimp").

La raison pour laquelle l'Alberta est un terreau fertile pour ce retour des dirigeables est la taille de l'équipement requis pour l'exploitation des sables bitumineux. Les convois de camions surdimensionnés mettent des jours à atteindre le nord de la province, et doivent parfois attendre des semaines pour avoir le feu vert pour emprunter la route étroite qui mène à Fort McMurray.

Un professeur de logistique de l'Université du Manitoba, Bary Prentice, a estimé qu'entre 90 et 700 dirigeables seront nécessaires d'ici 2015 pour exploiter les ressources du nord du continent.

Plans de la Russie

La Russie a aussi des plans pour des dirigeables cargo en Arctique et en Sibérie. «Il y a déjà des petits dirigeables qui inspectent les oléoducs et les gazoducs», explique l'économiste Barry Prentice en entrevue téléphonique.

«La compagnie Rosaerosystems a aussi des plans pour un cargo, mais la technologie est compliquée. L'altitude serait réglée en excitant les atomes d'hélium pour chauffer le gaz.»

Les compagnies pétrolières et minières ne sont pas les seules à s'intéresser aux dirigeables. L'armée de l'air américaine cherche depuis plusieurs années à mettre au point des dirigeables-espions volant à haute altitude, qui pourraient rester en place plusieurs semaines, voire plusieurs mois.

Ils pourraient aussi constituer une police d'assurance au cas où un pays ennemi réussisse à détruire des satellites de télécommunications, et prendre le relais pour assurer le bon fonctionnement du système de positionnement GPS.

Selon M. Prentice, le gouvernement canadien devrait aider le développement des dirigeables en construisant des hangars d'entretien. «Les États-Unis et l'Europe ont encore les hangars de la grande époque des dirigeables, dans les années 20 et 30, alors leurs compagnies ont un avantage.»