On savait déjà que notre pays produit les meilleurs hockeyeurs au monde et que le football s'y joue à trois essais plutôt qu'à quatre. Mais une autre chose distingue le Canada des États-Unis: mieux vaut se faire mettre à la porte ici... qu'au sud de la frontière.

On savait déjà que notre pays produit les meilleurs hockeyeurs au monde et que le football s'y joue à trois essais plutôt qu'à quatre. Mais une autre chose distingue le Canada des États-Unis: mieux vaut se faire mettre à la porte ici... qu'au sud de la frontière.

C'est ce que révèle la firme Right Management, qui a comparé les indemnités de départ versées aux travailleurs de 28 pays. L'étude, qui tombe à point en cette période de crise économique, révèle que les sommes versées en cas de démission ou de licenciement sont systématiquement plus élevées au Canada qu'aux États-Unis, qu'on soit haut dirigeant, cadre ou ouvrier.

Des exemples: selon le sondage réalisé par Right Management, un dirigeant licencié au Canada s'en tire avec une indemnité moyenne équivalente à 4,66 semaines de salaire par année de service, contre 3,04 aux États-Unis. L'indemnité tombe à 3,36 semaines par année de service pour un chef de département (contre 1,78 aux États-Unis) et à 2,35 semaines pour les employés en bas de l'échelle (contre 1,44 aux États-Unis).

"Au Canada, les différentes provinces ont légiféré pour fixer des conditions minimales de préavis ou d'indemnité en cas de licenciement, explique Monika Morrow, vice-présidente aux services de transition de carrière chez Right Management. Nous partons avec des minimums qui sont plus élevés qu'aux États-Unis."

Philippe Vachon, un associé chez Borden Ladner Gervais souvent impliqué dans les cas de licenciement, souligne que dans bien des États américains, les entreprises peuvent congédier ou mettre à pied leurs employés sans le moindre préavis et sans verser le moindre cent.

"Les Américains appellent ça le employment at will. C'est une autre mentalité, c'est le capitalisme pur. Là-bas, c'est: "T'es chanceux de travailler chez nous. Je peux t'embaucher quand je veux, et je peux te congédier quand je veux"."

Au Québec

Chez nous, la situation est plus complexe. Au Québec, par exemple, la Commission des normes du travail fixe les préavis minimums que doivent donner les entreprises aux travailleurs avant de mettre fin à leur contrat. Si le délai n'est pas suffisant, l'entreprise doit verser une indemnité compensatoire.

Mais il y a plus. Le code civil dit aussi que tout travailleur doit recevoir une compensation "juste et suffisante" en cas de perte d'emploi. Et les tribunaux, explique M. Vachon, ont toujours jugé que ce qui est "juste et raisonnable" est supérieur à ce que fixent les normes du travail. Résultat: tout le monde reçoit plus.

"Pendant plusieurs années, les tribunaux des provinces de common law comme l'Ontario ont été beaucoup plus généreuses que le Québec, observe M. Vachon. Mais depuis quelques années, on voit un rapprochement dans les indemnités de départ."

La firme Right Management, qui aide les entreprises à manoeuvrer pendant les périodes de transition, croit qu'un employeur a tout avantage à faire les choses correctement lorsqu'il licencie des travailleurs. D'abord, un employé bien traité sera plus susceptible de revenir au bercail si ses services sont à nouveau requis. "Il est aussi important de rassurer les employés qui restent en leur montrant que leurs collègues ont été traités avec dignité", dit aussi Mme Morrow. Sans compter l'importance de préserver une bonne image corporative.

Mais selon Philippe Vachon, de Borden Ladner Gervais, c'est la jurisprudence, et non la bonne volonté des entreprises, qui détermine les indemnités de départ. "Je n'ai pas vu, je ne vois pas d'entreprises qui accordent beaucoup plus que ce que la loi pourrait accorder. Quand tu mets à pied, en général, c'est parce que les affaires ne vont pas bien. Et quand ça ne va pas bien, tu veux bien traiter tes gens, mais tu ne peux pas leur offrir la lune."