C'est un fort recul qui survient après d'autres multiples diminutions. Les exportations internationales du Québec ont reculé de 8,3% de juillet à août... avant même que les Américains ne perdent confiance en leur économie.

C'est un fort recul qui survient après d'autres multiples diminutions. Les exportations internationales du Québec ont reculé de 8,3% de juillet à août... avant même que les Américains ne perdent confiance en leur économie.

«Plus ça va aller, plus les baisses vont être importantes», prédit Hélène Bégin, économiste principale chez Desjardins, qui suit les mouvements des exportations de mois en mois.

Les dirigeants du café Van Houtte sentent déjà cette baisse, eux dont les cafetières meublent les locaux de bureaux de Manhattan et les stations-services Chevron de la côte Ouest. «Il y a eu beaucoup de mises à pied dans les bureaux, explique Gérard Geoffrion, vice-président directeur chez le torréfacteur montréalais. Et quand les gens ne sont pas dans les bureaux, ils ne peuvent pas boire notre café.«

Résultat: Van Houtte a réduit de 2% à 5% ses exportations de café vers les États-Unis au cours des derniers mois... des données encore sommaires, précise M. Geoffrion.

Chez L'Oréal Canada aussi on a noté une baisse «importante» des exportations vers les États-Unis depuis avril dernier: -13% par rapport à ce qui avait été budgété, a indiqué hier un porte-parole.

Les données mensuelles sur les exportations sont volatiles. Souvent, on peut enlever le secteur qui baisse le plus et obtenir un coup de sonde plus positif, explique M me Bégin. Pour août, c'est presque peine perdue.

En éliminant le secteur aéronautique qui perd 63,8% pour les avions entiers et 9,1% pour les moteurs et pièces la baisse des exportations demeure importante, à 6% en termes réels.

En fait, 19 des 25 principaux secteurs d'exportation du Québec ont reculé en août. «Les bonnes nouvelles sont rares», résume M me Bégin. Depuis le début de l'année, la diminution est de 3,3% par rapport aux huit premiers mois de 2007. Mais les données de 2007 étaient déjà en recul par rapport à celles de l'année précédente.

Dans son budget de mars dernier, Québec prévoyait que la baisse serait de 0,6% cette année, suivie d'une hausse de 3,3% l'an prochain. Une prévision qui paraît aujourd'hui difficile à maintenir.

En fait, en dollars constants de 2002 c'est-à-dire en tenant compte de l'inflation le Québec n'a jamais réussi à exporter autant qu'à la fin de l'an 2000 et au début de l'année 2001. Au mois d'août, les exportations internationales du Québec ont atteint 5,35 milliards, pour un cumul de 45,5 milliards depuis le début de l'année. Sur un mois, c'est un milliard de moins que le sommet du début de la décennie.

Il y a bien la récente culbute du dollar canadien, malgré le rebond spectaculaire d'hier, qui pourrait aider les exportateurs : «Une mince consolation pour les entreprises exportatrices qui sont confrontées à une réduction de la demande de leur principal client», souligne M me Bégin.

À la fin de cette année, estime Desjardins, la balance commerciale du Québec sera déficitaire de 25 milliards, un sommet. C'est donc dire que nous aurons collectivement acheté pour 25 milliards de plus de l'étranger que ce que nous aurons réussi à vendre à l'extérieur de nos frontières.

La demande intérieure

Déjà, en mars, Québec avait prévu que cette balance commerciale négative allait faire perdre 2,3 points de pourcentage de croissance à l'économie. Autrement dit, ramenez cette balance à zéro et l'économie québécoise aurait crû à une vitesse plus qu'enviable.

Si l'économie du Québec a réussi à se tirer d'affaire malgré ce déficit commercial, c'est en raison de la forte demande intérieure : les Québécois ont continué de magasiner, aidés en cela par diverses baisses d'impôt. Mais voilà, rappelle Mme Bégin, les consommateurs québécois commencent eux aussi à perdre confiance. «La donnée sur la confiance des consommateurs nous a ébranlés, dit-elle. Ça ajoute des points d'interrogation.»

Ce qui nous ramène au café de Van Houtte. Comme d'autres exportateurs, ils cherchent la recette qui fera augmenter leurs ventes aux Américains. Gérard Geoffrion a une idée: mettre en valeur les cafés de spécialité dans les bureaux, pour attraper «les gens qui étaient habitués à aller chez Starbucks une ou deux fois par jour se payer des cafés à 4$ ou 5$... On pense que ça peut compenser l'effet négatif du moins grand nombre de personnes dans les bureaux.»