Jetez vos cennes noires, vos cinq cennes et vos vingt-cinq cennes. De toute façon, il faudra faire de la place dans le porte-monnaie pour les nouvelles pièces de 20 cents et de 5$.

Jetez vos cennes noires, vos cinq cennes et vos vingt-cinq cennes. De toute façon, il faudra faire de la place dans le porte-monnaie pour les nouvelles pièces de 20 cents et de 5$.

Dans une étude rendue publique mercredi, le Mouvement Desjardins propose une véritable révolution du système monétaire canadien au cours de la prochaine décennie.

En plus d'abolir le sou noir, la pièce de 5 cents et la pièce de 25 cents, le mouvement coopératif introduirait des pièces de 20 cents et de 5$. Autant de changements drastiques mais néanmoins nécessaires en raison de la hausse du niveau de vie au Canada.

«Avec la hausse du pouvoir d'achat des consommateurs, il est normal d'ajuster la valeur des pièces de monnaie en conséquence», dit François Dupuis, économiste en chef du Mouvement Desjardins.

Le changement le plus urgent? L'abolition du sou noir, maintenu en vie artificiellement par la Banque du Canada au coût de 150 millions de dollars par année, selon Desjardins. Il y a présentement 31,7 milliards de cennes noires en circulation au Canada. Leur poids équivaut à celui de 7,3 tours Eiffel.

Le mouvement coopératif souhaite aussi que le Canada se débarrasse de la pièce de cinq cents, dont le pouvoir d'achat a diminué de 75% depuis sa création en 1908.

«Aujourd'hui, on ne peut plus rien acheter pour une cenne ou pour cinq cennes», dit François Dupuis.

Selon la proposition de Desjardins, les prix seraient arrondis aux 10 cents près. L'édition provinciale de La Presse, vendue 84 cents en kiosque, serait ainsi vendue 80 cents.

Desjardins assure que l'abolition des deux pièces de monnaie ne provoquerait pas d'inflation.

«La concurrence fait en sorte que les commerçants ne pourront pas augmenter leurs prix», fait valoir François Dupuis. L'économiste cite l'exemple de la Nouvelle-Zélande, qui a aboli ses pièces de 1 cent et de 5 cents au début des années 90 sans provoquer d'inflation.

La pièce de 25 cents -un «accident de l'histoire», selon François Dupuis- ne survivrait pas à la révolution proposée par Desjardins.

Elle serait remplacée par une pièce de 20 cents. Il faudrait par la même occasion ressusciter la pièce de 50 cents, toujours en circulation mais peu utilisée par les consommateurs.

«Présentement, la pièce de 50 ans est avant tout une pièce de collection, dit François Dupuis. Les gens ne l'aiment pas car elle est trop grosse. Il faudrait une pièce de 50 cents plus légère car les gens ne se promèneront pas avec une rondelle de métal dans les poches.»

Avec une nouvelle pièce de 20 cents et le retour de la pièce de 50 cents, le Canada se conformerait au système D-metric (1-2-5-10), qui calcule les pièces de monnaie nécessaires à une économie selon le pouvoir d'achat de ses consommateurs.

«Il faudra toutefois s'habituer à dire cinq trente sous pour une piastre!» blague François Dupuis.

Desjardins suggère aussi la création d'une pièce de 5$, qui signifierait la mort du billet de 5$. Trop populaire, le billet bleu à l'effigie de Wilfrid Laurier doit actuellement être retiré de la circulation après un an. Les billets de 20$ durent jusqu'à quatre fois plus longtemps.

«On n'est pas loin de l'époque où les gens mettaient du scotch tape sur leurs vieux billets de 1$ parce qu'ils étaient trop usés», dit François Dupuis.

Un billet de 500$

Sur le plan mathématique, la hausse du niveau de vie des Canadiens justifie la création d'un billet de 500$ ainsi que la résurrection du billet de 1000$, aboli par la Banque du Canada en 2000. Desjardins doute toutefois que ce soit une bonne idée.

«De tels billets favorisent le blanchiment d'argent et le crime organisé», dit François Dupuis.

Le Mouvement Desjardins opte pour un compromis: un billet de 200$ qui pourrait être introduit d'ici 20 ans si la hausse du niveau de vie le justifie.

«Avec les nouvelles technologies de paiement, nous n'avons plus besoin de billets de banque aussi élevés, dit François Dupuis. C'est rare qu'on paie comptant un achat de 250$. On utilise plutôt une carte de crédit ou de débit.»

François Dupuis est bien conscient qu'il s'attaque à un puissant symbole de l'économie canadienne. Même si les économies découlant de sa petite révolution monétaire ne seront pas substantielles, il estime que le jeu en vaut la chandelle.

«Dans cette ère de compétitivité, il n'y a pas de petites économies», dit-il.